Pour lutter contre le « déferlement de propos haineux et discriminants » sur Facebook, le journal Nord Littoral a décidé de dresser une liste « de la honte » en donnant l’identité des internautes coupables de ces excès.
C’est dans l’optique de soutenir la démarche « apolitique » de Brigitte Bourguignon, député socialiste du Pas-de-Calais, qui a lancé une pétition pour inciter Facebook à sévir, que le quotidien régional, déjà habitué à l’attaque frontale de confrères, s’est livré à ces pratiques douteuses.
Car « être Charlie ne signifie pas pouvoir être raciste, antisémite, haineux, appeler au meurtre », estime le journal. Ainsi, constatant que sur sa page Facebook « les commentaires sur le sujet de l’immigration offrent un ramassis de propos inqualifiables », Nord Littoral s’est engagé à signaler « tous les propos répréhensibles du point de vue de la justice. Pour le bien de tous, par respect. »
Emboîtant le pas au quotidien allemand Bild, qui avait fait de même, le titre nordiste dresse un « mur de la honte » en citant des commentaires tels que « pourquoi ne pas construire un camp de concentration, on sera tranquille », « il suffit de leur rouler dessus, au bout d’une dizaine, ils se calmeront » ou encore « les camionneurs devraient être armés et ne pas hésiter à tirer », en prenant soin de diffuser en parallèle les nom et prénom des utilisateurs concernés.
Pour se justifier, Nord Littoral précise qu’il n’est « pas pro-migrants » et qu’il « ne censurera jamais les internautes » qui disent qu’ils ne veulent pas des migrants dans leur ville. Pourtant, cette liste noire qui extrait des commentaires de la masse pour les mettre en lumière ne peut qu’interpeller.
Plutôt que de s’interroger sur la violence, tout aussi réelle, qui consiste à imposer des milliers de clandestins à des villes et villages français, Nord Littoral a choisi de se concentrer uniquement sur les réactions à celle-ci. Certes, les propos de ces internautes sont excessifs et tombent sous le coup de la loi mais il n’empêche que les dénoncer publiquement s’apparente à de la délation, une pratique que l’on croyait réservée aux temps de guerre et d’occupation…
Et puisque l’on parle d’excès, n’est-il pas excessif et moralement condamnable d’imposer des centaines de « réfugiés » à des villages ruraux ? N’est-il pas excessif de transformer Calais en plus grand bidonville d’Europe ? N’est-il pas excessif de loger ces migrants par milliers, tous frais payés, quand de nombreux Français dorment dehors ?
Entre la violence de la politique du gouvernement et la violence des réactions qu’elle génère, Nord Littoral semble avoir choisi son camp, allant jusqu’à passer par la délation pour affirmer son engagement. L’esprit Charlie, c’était juste pour la photo.
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Photo : “Bocca di leone”, ou “bouche de dénonciation” à Venise. Crédit : Patricia Hofmeester / Shutterstock.com