Le podcast (ou balado-diffusion, selon le joli mot de nos cousins québécois) est en constante augmentation depuis quelques années de manière générale sur la toile. Mais il est peut-être et surtout en train de devenir le nouvel horizon de la presse en ligne. Utilisant la technologie du flux RSS, ce mode de diffusion audio est aussi aisé à fabriquer qu’à consommer. Selon des chiffres de décembre 2019, on en compte ainsi plus de 800 000 en France. Le développement est exponentiel et vertigineux.
Plusieurs familles de podcasts
Le podcast regroupe en réalité plusieurs familles. La première et la plus évidente, ce sont les replays d’émission de radio (ou « radio de rattrapage ») : tout simplement les programmes des stations de radio qui peuvent être réécoutés à la demande. Aujourd’hui, quasiment toutes les radios proposent naturellement leurs émissions en podcasts. La seconde famille regroupe ce que l’on appelle les podcasts « natifs » : des contenus audio produits en vue d’une diffusion directe auprès du public, sans passage à la radio. Ils sont beaucoup plus nombreux car non soumis à une grille de programmes et surtout plus faciles à produire. Ils pullulent, avec des qualités très inégales.
Les podcasts indépendants sont de toute nature, de la fiction au documentaire, et traitent de tous les sujets. Ils ont l’avantage d’être libres et soumis à aucune condition, comme les youtubeurs qui surent développer leur propre propos. Ils ont cependant le désavantage de demeurer confidentiels, à défaut d’une chaîne qui les regrouperait tous, comme Youtube pour la vidéo. C’est pourquoi se développent parallèlement les réseaux de podcasts, sous la houlette de maisons de production qui tentent ainsi de cumuler les chiffres d’audience. Audible, propriété d’Amazon, s’impose pour le moment comme le chef de file de cette méthode.
La presse écrite s’y engouffre
Mais au-delà de ça, c’est surtout la presse écrite qui se jette depuis quelques mois à corps perdu dans ce qui apparaît comme un nouvel eldorado. Effet de saturation ? La vidéo, média roi depuis une quinzaine d’années sur le web semble marquer le pas. Comme si le public découvrait enfin les défauts de l’écran qui, au-delà de sa séduction immédiate, empêche généralement de penser et de réfléchir. Les nouveaux modes de consommation de l’information jouent aussi en la matière : il est plus aisé pour le public pris dans de longs déplacements pour aller travailler d’écouter un podcast, dans sa voiture ou dans les transports en commun, que de regarder une vidéo.
On trouve ainsi des podcasts chez des acteurs des médias aussi variés que Society, Mediapart, Gala, Conflits, L’Obs, Challenge ou Le Figaro… Si certains se limitent encore à l’enregistrement simple d’éditoriaux ou à la lecture d’articles, d’autres n’hésitent pas à inventer des formats neufs. Ce peut être des émissions historiques comme des enquêtes journalistiques, ou encore des interviews à l’état brut.
Rentabilité incertaine
Demeure la question de la rentabilité, donc du financement. Si c’est pour la presse écrite en ligne d’abord un moyen d’augmenter ses audiences, bientôt se posera pour elle la question de la « monétisation ». Plusieurs hypothèses sont déjà explorées : la publicité dite « au CPM » (c’est-à-dire au « coût pour mille écoutes ») qui repose sur le schéma classique de la publicité télévisuelle ou de YouTube, où plus le podcast est écouté, plus il rapporte.
Mais les tarifs demeurent très bas, entre 15 et 20 euros pour mille écoutes. Autre tentative : le « sponsoring », où des marques financent des saisons de podcast, pour des tarifs de quelques dizaines de milliers d’euros. L’offre payante est aussi testée, notamment par Radio France. Enfin, le « brand content » c’est-à-dire la publicité déguisée, qui tient aujourd’hui la corde dans le monde de la vidéo, notamment chez Brut ou Konbini.
Le podcast est encore une terre à moitié vierge en France, dont les frontières doivent être repoussées. La révolution audio est en route, mais le point d’arrivée est encore incertain.
Sur le même sujet voir notre article sur Majelan de Mathieu Gallet.