Selon l’essayiste Matthieu Bock-Côté, « il suffit à la gauche de se voir contestée pour se sentir assiégée ». Et de faire les quatre cents coups, plus un ou deux. La prestation d’Eric Zemmour à la convention de la droite n’est pas passée inaperçue (voir son discours complet). Saisine de la société des journalistes du Figaro qui dénoncent un « rentier de la polémique » salarié du quotidien et réclament son exclusion, LCI acculée à de plates excuses après avoir diffusé le discours en direct (voir notre article ici) et pour finir une caricature en nazi à Télérama et condamnation au bûcher par Le Monde.
Audiard à la rescousse
Les cons ça ose tout, disait Audiard. Caricaturer un juif en nazi, c’est du haut niveau aurait dit le dialoguiste. Que reprochent les bien-pensants à Zemmour ? D’avoir entre autres dit que tous les problèmes de la France étaient aggravés par l’immigration et l’islam, « la double peine ». D’avoir aussi fixé les enjeux, dans un discours sans fioriture : « jamais le peuple français n’a été menacé de remplacement sur son propre sol ; c’est la survie du peuple français qui est en jeu », a‑t-il notamment déclaré.
Noiriel en embuscade
Du reste, Telerama ne faisait que suivre la voie glissante ouverte par Gérard Noiriel, historien communiste et directeur d’études à l’EHESS, qui comparait dans son dernier ouvrage Zemmour à Drumont, auteur antisémite de la fin du XIXe, auteur en 1886 de la France Juive, vendue à 60.000 exemplaires la première année et premier best-seller de la Troisième République : « Sur la forme, Zemmour ne peut pas écrire comme Drumont, car des lois répriment désormais le racisme. Mais il faut aller plus loin. Dans L’Archéologie sur savoir, Michel Foucault distingue la couche superficielle des échanges que l’on peut avoir tous les jours, de leurs règles de “grammaire” sous-jacentes. C’est à ce niveau que se situent les grands points communs entre Zemmour et Drumont ». Voir notre article sur le sujet ici.
Le Monde en mal de trémolos
Dans un éditorial du 1er octobre 2019 (édition en ligne) le quotidien du soir lâche les grandes orgues culpabilisatrices : « …les crimes contre l’humanité ont commencé par des mots… Stigmatisation, exclusion, expulsion, extermination ». Et de surenchérir en parlant de « violence insensée, fantasmes poscoloniaux, identité fantasmée, trente-deux minutes de haine, discours hostile à la démocratie et d’inspiration fasciste ». Tout en citant le communiste Noiriel comme caution intellectuelle. Pour conclure par un appel à faire taire le journaliste (pourquoi pas son incarcération ?) « Eric Zemmour doit cesser d’être un « bon client » pour les journalistes et les médias qui les emploient. Il doit être traité pour ce qu’il est : un délinquant et un pyromane ». Tout en refusant – sans rire — « leçons de morale et anathèmes », fermez le ban, Audiard est pulvérisé.
En reprenant terme à terme l’éditorial du Monde, un observateur honnête pourrait relever : appel à la haine, invocation de la censure contre un journaliste, appel à la mort professionnelle et sociale. Le tout pour « la défense de l’universalité des droits humains ». Et de quelques intérêts bien compris, ajouteraient d’autres.
Réplique de Benoît Rayski
Benoît Rayski, sur Atlantico, commente la polémique, à laquelle même Edouard Philippe a apporté son avis, dénonçant des « discours nauséabonds » : « Le polémiste est prisonnier de son personnage et de son public. Il lui faut tonner pour être conforté dans le rôle de l’homme qui dit tout haut ce que les Français pensent tout bas. Et comme les Français le pensent de moins en moins bas, il le dit de plus en plus fort. L’exaspération grandissante vient du fait qu’Edouard Philippe et les siens sont, eux, de plus en plus sourds : une infirmité qu’ils cumulent avec l’aveuglement. Ils n’entendent pas la colère qui monte face aux agressions ».
Quant à Télérama, son cas est vite réglé : « PS : Télérama représente Zemmour en SS : il entre dans le studio de CNews où il va avoir une chronique. “Nauséabond” ? “Retour des heures les plus sombres de notre histoire” ? Non, c’est juste dégueulasse ». Ceux qui écrivent à longueur de journée des lettres de dénonciation, ceux qui pourchassent les intellectuels qui ne pensent pas comme eux et rêvent d’autodafés des auteurs dont ils ne supportent pas les écrits, ceux qui appellent à leur mort sociale et professionnelle, ceux-là se réclament du « Camp du Bien ». De quel « Bien » peut-il s’agir ? Le lecteur qui a la réponse gagne un numéro de Télérama ou du Monde, au choix.