Journaliste et porte-parole du collectif féministe « Prenons la une »
Aude Lorriaux est une journaliste française passée par l’Institut français de presse et l’école de journalisme de Berkeley en Californie. Elle s’est spécialisée dans les sujets de politique et de société avec un prisme féministe militant très marqué.
Formation
Après deux années de classe préparatoire littéraire au prestigieux lycée Louis-Le-Grand (2000–2002), Aude Lorriaux obtient une licence puis une maîtrise de philosophie à Panthéon Sorbonne (Paris IV). Elle intègre l’Institut d’Études politiques de Lille en 2004 et y obtient un Master spécialité Economie et Finances.
En 2007, elle entre à l’Institut français de presse et en ressort deux ans plus tard titulaire d’un Master en journalisme, à l’issue de quoi elle part aux États-Unis étudier à l’UC Berkeley Graduate School of Journalism, Californie, pour une année.
Parcours professionnel
Elle connaît une carrière en pointillés, passant rapidement d’un média à un autre. Elle commence en effet à écrire pour (feu) Fluctuat.net où elle publie déjà de nombreux articles comme pigiste sur les questions féministes et celle des minorités, notamment sexuelles. En 2010, elle écrit également des articles pour La Croix.
Son premier grand media est le Figaro, pour lequel elle écrit pendant quelques mois en 2011. Après un an et demi au Huffington Post entre 2012 et 2013, elle entre chez l’AFP pour un an à la section « Medias ».
Entre juillet 2014 et mai 2015, elle écrit des articles pour Slate, Le Huffington Post, Métronews ou encore L’Étudiant.
De mai 2015 à octobre 2017, elle est en poste chez Slate pour lequel elle couvre des sujets de politique et société. Elle s’y intéresse aux questions de discriminations, avec de nombreux sujets sur différentes minorités comme les personnes en surpoids ou les transsexuels avec des enquêtes telles que celle publiée le 11 décembre 2014 sur Slate, « La souffrance des enfants trans’ », ou encore celle publiée le 23 janvier 2019 sur Slate, « « Hunger » de Roxane Gray : l’obésité est bien plus qu’une histoire de poids et de nourriture ».
En 2018, après un rapide passage en tant que journaliste rédactrice spécialisée en politique et société chez Vraiment Hebdo, elle redevient pigiste, cette fois pour Slate et pour la revue féministe Causette. Elle continue également d’écrire pour L’Étudiant.
Son travail sur la question des minorités la mène en 2017 à co-écrire avec l’historienne et militante de gauche Mathilde Larrère aux éditions du Détour un ouvrage sur les minorités en politique, Des Intrus en politique : femmes et minorités, dominations et résistances.
Elle fait partie de Prenons la une, collectif co-fondé par Léa Lejeune et Claire Alet pour une meilleure représentation des femmes dans les média. En 2018, lorsque le collectif prend le statut d’association de loi 1901 et étend ses compétences à la défense des victimes de harcèlement et de sexisme, elle en devient porte-parole avec Lauren Bastide.
À ce titre, elle intervient sur de nombreux média en tant qu’experte dans les inégalités professionnelles hommes-femmes, notamment dans la récente affaire de la Ligue du Lol. Elle en connaît personnellement une des protagonistes principales, Léa Lejeune, qui s’est positionnée comme victime de la Ligue du Lol, puisque cette dernière est co-fondatrice et présidente de Prenons la une.
Elle se lance dans le podcast en 2017 en animant l’émission « Vieille Branche » produite par le studio « Nouvelles Ecoutes » co-fondé par Julien Neuville et Lauren Bastide. Elle co-crée ensuite en janvier 2019 avec Marie Kirschen et Nassira El Moaddem le podcast mensuel Le Deuxième Texte, pour présenter des ouvrages féministes sur les questions de genre et de discriminations.
Elle est actuellement chef du service actu de 20 Minutes, spécialisée en politique et égalité homme – femme.
Parcours militant
Les articles de la journaliste sur Slate reprennent les combats féministes traditionnels tels que la défense de l’accès à l’avortement, ou l’égalité homme – femme, et des combats plus récents comme par exemple la lutte contre les violences faites aux femmes. Elle promeut dans ses articles les concepts clefs du féminisme contemporain, parmi lesquels ceux de « culture du viol » ou de « féminicide ».
Le féminisme d’Aude Lorriaux est intersectionnel, c’est-à-dire qu’il fait se rejoindre la cause des femmes et celles de toutes les minorités considérées comme victimes de discriminations (minorités dites « racisées », LGBT, personnes en surpoids…). Elle est particulièrement engagée en faveur des minorités sexuelles, avec plusieurs articles sur le sujet de la transsexualité comme celui publié le 2 septembre 2016 sur Slate sur un homme trans qui porté un enfant. Elle co-crée d’ailleurs en 2019 avec Marie Kirschen, journaliste et militante LGBT le podcast « Le Deuxième Texte ».
Elle écrit ses tweets en écriture inclusive, qu’elle promeut également dans ses articles. L’article qu’elle signe le 10 avril 2019 pour Slate « L’histoire de M., première personne intersexe au monde à porter plainte pour mutilations », comporte par exemple un chapeau explicatif quant à ce choix :
« Dans cet article qui raconte l’histoire de M., une personne née avec les attributs des deux sexes, féminin et masculin, et qui s’identifie aujourd’hui notamment comme « neutre, fluide, non binaire », nous avons choisi, avec son accord, de remplacer les pronoms personnels il/elle par «iel». Nous avons aussi décidé d’utiliser le point médian, pour faire ressortir dans les accords la marque à la fois du masculin et du féminin. »
Elle figure au titre de journaliste féministe et de porte-parole de Prenons la Une parmi les commentateurs principaux de l’affaire de la Ligue du Lol (un entretien accordé à Armel Hemme pour Nova et publié le 14 février 2019 ou encore cet entretien accordé à Mahaut Landaz pour Le Nouvel Obs et publié le 12 février 2019). Elle en publie également de nombreuses analyses sur les médias auxquels elle participe (le 16 février 2019, dans Slate, « Pourquoi l’affaire de la Ligue du LOL ne sort que maintenant »). Dans ces analyses, elle cherche à prouver une logique discriminatoire systématique. L’affaire relèverait d’une logique sexiste selon laquelle les hommes cherchent à exclure les femmes d’un milieu professionnel, ici le journalisme, par des techniques comme le harcèlement.
Notons qu’à travers son engagement dans le collectif Prenons la Une, la journaliste connaît personnellement une des principales protagonistes de l’affaire, Léa Lejeune, dont la vidéo de témoignage publiée par Brut et l’article publié sur Slate le 12 février 2019 « J’ai subi des raids de la Ligne du Lol et cela a pesé dans ma carrière » a largement contribué à alimenter le scandale.
Publications
Elle publie en 2017 Des Intrus en politique : femmes et minorités : dominations et résistances, qu’elle écrit avec Mathilde Larrère, historienne engagée au Parti de Gauche et spécialiste des mouvements révolutionnaires et du maintien de l’ordre en France.
L’ouvrage se fonde sur une trentaine d’entretiens avec des personnalités et responsables politiques appartenant à des groupes discriminés (femmes, personnes « racisées », homosexuels…). L’analyse des deux auteurs les mène à la conclusion d’une « grande continuité entre la période qui commence à la Révolution française et aujourd’hui dans les attaques sexistes, racistes, homophobes […]. » (Interview d’Aude Lorriaux dans « On va plus loin » sur Public Sénat suite à la publication de l’ouvrage).
Les deux auteurs publient en 2018 une seconde analyse sur le sujet, Les femmes en politique, depuis quand ? sur la revue en ligne Cairn.info.
Collaborations
Elle anime de septembre 2017 à juin 2018 le podcast « Vieille Branche », des entretiens bi-mensuels avec des personnalités du monde politique, culturel ou scientifique âgées de plus de 75 ans. Le podcast est une création de l’agence de production de Lauren Bastide, « Nouvelles Écoutes »
Elle co-crée un an plus tard le podcast féministe mensuel « Le Deuxième Texte » avec Marie Kirschen et Nassira El Moaddem, qui présente des ouvrages de femmes et/ou féministes. L’objectif des trois journalistes et militantes est de « faire un podcast qui donne des outils pour comprendre un monde en chantier, où les rapports entre les femmes et les hommes n’ont jamais été aussi bousculés […]. Bref, « Le Deuxième Texte, c’est plus qu’un podcast de livres, une boîte à concepts féministes comme une boîte à outils pour construire le monde de demain ».
Ce qu’elle gagne
Non connu.
Sa nébuleuse
Léa Lejeune : journaliste économique chez Challenges après un passage chez Libération, elle co-fonde en 2014 le collectif de femmes journalistes Prenons la une, dont Aude Lorriaux est désormais porte-parole. Son portrait.
Lauren Bastide : journaliste pour Elle Magazine durant plus de 9 ans, elle devient ensuite chroniqueuse pour « le Grand 8 » sur D8, puis pour « Le Grand Journal » de Canal +. Désormais à son compte, elle s’est spécialisée dans des formats podcasts qu’elle produit via le studio de production qu’elle a créé en 2016 avec Julien Neuville. Aude y anime une émission intitulée « Vieille Branche ». Militante féministe elle aussi, elle fait partie du collectif Prenons la une monté par Claire Alet et Léa Lejeune, dont elle est depuis 2018 porte-parole aux côtés d’Aude Lorriaux. Son portrait.
Marie Kirschen : après une première expérience de pigiste chez Libération et Têtu, elle fonde la revue lesbienne Well Well Well. Désormais rédactrice en chef des Inroks, la journaliste est spécialiste des questions féministes et LGBT. Elle fait partie des premiers signataires de l’Association des Journalistes LGBT. Elle lance avec Aude Lorriaux et Nassira El Moaddem en janvier 2019 « Le Deuxième Texte ». Son portrait.
Mathilde Larrère : historienne spécialiste des mouvements révolutionnaires et du maintien de l’ordre en France. Ancienne élève de l’ENS Saint-Cloud, elle est major de la promotion 1994 de l’agrégation d’histoire. Engagée auprès du Parti de Gauche depuis 2012, elle revendique de défendre une vision politique de l’Histoire et n’hésite pas à mêler travail de recherche et combat militant. C’est notamment le cas dans l’ouvrage qu’elle co-écrit en 2017 avec Aude Lorriaux, Des Intrus en politique : femmes et minorités, dominations et résistances, analyse de la présence des femmes et des minorités en politique qui se fonde sur des hypothèses du féminisme intersectionnel.
Elle l’a dit
Sur les raisons pour lesquelles l’affaire de la Ligue du Lol est sortie malgré des faits datant de plusieurs années : « Pourquoi ça explose maintenant ? Il y a plein de facteurs. Le fait qu’au moment de #MeToo, les femmes se sont remises à parler de tout ça, notamment. Mais ça a pris du temps car nous sommes journalistes, on fait très attention à la diffamation. Beaucoup de femmes ont hésité à parler par peur d’être trop isolées, de se prendre un retour de bâton. Il y a le fait qu’on se soit organisées collectivement ensemble : aujourd’hui, les journalistes féministes se retrouvent entre elles, il y a plein de lieux où elles parlent ensemble et je pense qu’elles en sont plus fortes. » (Entretien accordé à Armel Hemme pour Nova et publié le 14 février 2019)
« Dégommer les femmes et les minorités, c’est une manière de se faire de la place, d’éliminer une concurrence possible et d’assoir sa domination. […] Ce « boys club » d’hommes qui étaient dans cette ligue ont profité de cette image de mecs cools qu’ils se sont donnés, de « loleurs ». Ils en ont bénéficié auprès des rédactions pour lesquelles ils postulaient. Ils ont éliminé d’une certaine manière une forme de concurrence. Les femmes et les minorités qui étaient décrédibilisées, c’était de potentielles personnes qui pouvaient être employées à leur place ». (Entretien accordé à Mahaut Landaz pour Le Nouvel Obs et publié le 12 février 2019)
« Si la «race» n’a pas d’assise biologique, alors que le sexe continue d’être perçu comme une chose biologique, pourquoi passer de blanc à noir choque-t-il plus que de “changer” de sexe ? » dans un Tweet du 6 août 2018 pour faire la promotion de son article « Le transracialisme existe-t-il ? (et pourquoi serait-il moins accepté que la transidentité » publié sur Slate le 6 août 2018
Si la «race» n’a pas d’assise biologique, alors que le sexe continue d’être perçu comme une chose biologique, pourquoi passer de blanc à noir choque-t-il plus que de “changer” de sexe? https://t.co/KjBEQk9Xi0
— Aude Lorriaux (@audelorriaux) August 6, 2018