Spécialiste de l’extrême droite et… des fake news !
4400 retweets, 2000 citations, 6000 « j’aime » et une reprise par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, la photo et le message postés le samedi 15 janvier 2022 par la « journaliste indépendante » Daphné Deschamps ont électrisé les réseaux sociaux et suscité bien des réactions au sein de la classe politique. Fin janvier 2023 elle participe à l’agression d’un autre journaliste, Jordan Florentin de Boulevard Voltaire, lors d’une manifestation.
Paris, France. Environ 200 neonazis, bras tendus, en pleine rue, au cœur de la manifestation anti pass. Tout va bien. pic.twitter.com/0Z75iF1GBn
— daphné deschamps 🇵🇸 (@daphne_dsch) January 15, 2022
Daphné voit des nains – pardon – des néo-nazis partout
Il faut dire que toutes les cartes étaient présentes pour assurer à Daphné Deschamps le succès de sa publication : autodécrétée « experte » de l’extrême droite, l’occasion était trop tentante pour la jeune femme : elle y a vu des hommes, blancs, le visage couvert pour nombre d’entre-deux et la main levée à 70° vers le ciel, bras tendu. Immédiatement, Daphné se saisit de son ordinateur et s’empresse de tweeter : « Environ 200 néonazis, bras tendu, en pleine rue, au cœur de la manif anti-pass, tout va bien. » Hélas, c’était une fakenews, les manifestants tapaient dans leurs mains en rythme… à vouloir trop prouver…
Fake news. Signalement. pic.twitter.com/Er9GTrhQtB
— Duval Philippe (@p_duval) January 17, 2022
Deschamps aux champs, de Libé à Politis en passant par L’Huma
Mais qui est cette Daphné Deschamps ? Se décrivant comme spécialiste de l’extrême droite, du féminisme et des mouvements sociaux sur son blog personnel, Mademoiselle Deschamps est, au regard de la majorité de ses publications sur les réseaux sociaux, avant tout une militante d’ultragauche, proche des mouvances antifascistes. Dotée d’expériences professionnelles chez Libération, Le Parisien ou encore l’Humanité, Daphné Deschamps collabore régulièrement avec le très gauchiste magazine hebdomadaire Politis qui connait au demeurant de graves difficultés financières et a failli sombrer dans une lamentable escroquerie de trafic de promesses de papiers de régularisation par son ancien rédacteur en chef et le compagnon de celui-ci ! Que du beau monde.
Voir aussi : Le rédacteur en chef de Politis mêlé à un trafic avec les clandestins
Membre de la très woke «AJL » LGBTQI+ etc
Daphné est aussi membre de l’AJL, l’Association des Journalistes LGBTQI+, sorte de syndicat journalistique qui s’est donné pour mission de défendre au mieux la communauté LGBT (homosexuels, transsexuels, adeptes de la théorie du genre etc…).
Sur leur site internet, l’AJL se définit de la sorte : « Nous sommes des journalistes professionnels décidés à contribuer à améliorer le traitement des sujets LGBTI par les rédactions. Il ne s’agit pas faire le procès des médias, encore moins de devenir des sortes de censeurs LGBTI faisant la leçon à nos confrères et consœurs. Mais de les aider à traiter ces questions souvent méconnues et d’intervenir ou d’alerter quand nous le jugerons nécessaire. » Refusant toute accointance avec le lobby LGBT, l’AJL officie en bon chien de garde du wokisme et de la pensée déconstructiviste. Avec ses « kits à l’usage des rédactions », l’AJL cherche à imposer aux journalistes écriture inclusive, novlangue américanisée et « programmes d’acceptation » des personnes LGBTQI+.
En 2015, l’AJL publie et fait ratifier par de nombreux médias une « charte contre l’homophobie » demandant aux rédactions, entre autre, de Veiller à respecter le genre social des personnes trans (et non s’en tenir au genre légal), notamment dans l’utilisation des pronoms personnels, Donner la parole aux lesbiennes, Ne pas présumer que les personnes interviewées sont hétérosexuelles ou encore Prendre en considération les remarques des associations LGBT si elles estiment un contenu problématique. Cette charte sera signée par une partie des principaux médias français Le Monde, l’Equipe, Libération, Les Inrockuptibles, Mediapart, rue89, Slate, Closer ou encore MadmoiZelle.com.
Voir aussi : L’Association des journalistes LGBT, du lobby à la dictature masquée
Des femmes, même inventées
Daphné Deschamps a aussi fait de sa spécialité journalistique la lutte des femmes. Ainsi de son passage à l’Humanité, on retrouve une dizaine d’articles portant essentiellement sur le combat féministe dans l’Histoire. Se mélangeant parfois les pinceaux et semblant confondre son métier avec l’idéologie qu’elle soutient, il arrive à Daphné de se livrer à quelques approximations historiques et géopolitiques.
Ainsi, dans un papier intitulé : « De la guerre d’Espagne au Rojava, femmes au combat », notre « experte » de l’extrême droite semble aller un peu vite en besogne en faisant des femmes kurdes combattantes en Syrie et en Irak d’authentiques féministes. En réalité et selon plusieurs témoignages, ces femmes portant des AK-47 sur le dos faisaient parti intégrante d’une campagne de communication kurde dont l’objectif était, évidemment, de susciter l’empathie chez les Occidentaux et de faire écho aux grandes crises sociétales que celui-ci traverse, dont le féminisme. Dans les grandes batailles qui ont opposé le YPG et/ou le PKK (milices kurdes) à Daech ou à l’armée turque, il a très peu été fait mention de femmes soldats et le féminisme kurde relève de la légende.
Une journaliste antifa
Les contributions écrites de Daphné Deschamps au magazine « Politis » sont éloquentes ; c’est désormais toute la « fachosphère » qui est analysée par l’œil soi-disant « expert » de notre journaliste en herbe.
Là encore, le regard est très partial et dépasse souvent les limites de la désinformation. Dans son article : « Dissolution des groupes d’extrême droite : une stratégie inopérante », Daphné s’attèle à dénoncer l’inutilité de la politique de Gerald Darmanin face à la « violence » montante des groupuscules identitaires. Problème : Daphné Deschamps cite explicitement, pour illustrer son propos, Yem Coldas, un porte-parole de la « Jeune Garde », un groupe antifasciste lui-même connu pour ses actions de militantisme souvent très violentes. Ce sont par exemple des militants de « La Jeune Garde » qui s’en sont pris physiquement aux filles du « Collectif Némésis » lors d’un rassemblement féministe à Paris en novembre 2021.
Sur le fond, Daphné Deschamps livre une vision déformée car profondément biaisée par ses convictions. L’autre procédé manipulatoire qu’utilise Daphné Deschamps consiste en la non-contextualisation d’un fait de violence. Dans l’article qu’elle a écrit : « Néonazis, royalistes, identitaires… Bienvenue au meeting de Zemmour », celle-ci revient sur les évènements du meeting de Villepinte et les affrontements physiques entre partisans d’Éric Zemmour et militants de SOS Racisme. Y dénonçant la violence des « groupes identitaires » qui « fréquenteraient les équipes de campagne de Zemmour », Daphné omet évidemment de parler des dizaines d’antifa venus pour en découdre avec les soutiens du candidat. Rappelons que les équipes de sécurité du meeting avaient intercepté de nombreux activistes armés de marteaux, brises vitres, matraques télescopiques, sans compter les dizaines d’interpellations policières qui ont eu lieu à l’extérieur du meeting.
Dans une certaine confusion sémantique, Daphné Deschamps cherche aussi à brouiller l’esprit critique du lecteur quant au regard qu’il pourrait poser sur Éric Zemmour et ses équipes. En mélangeant volontairement de jeunes influenceurs patriotes (et non pas tous « identitaires » comme elle l’écrit) avec des groupes parfois plus radicaux comme les Zouaves de Paris (groupe dissous), Daphné met tous les soutiens de Zemmour dans un même sac : celui des « violents anti-républicains ». Ce qui s’appelle un procédé.
Enfin, lorsque Daphné n’est pas obsédée à inventer des fake news, elle vient garnir les rangs des nervis dits antifascistes. Le 31 janvier 2023, en marge des manifestations contre la réforme des retraites, le journaliste Jordan Florentin, ancien reporter du Livre Noir œuvrant maintenant chez Boulevard Voltaire, ainsi qu’une de ses collègues, voient leur matériel mis au sol par un groupe d’antifas venu faire le ménage. Les photos postées sur les réseaux sociaux sont sans appel, Daphné faisait partie de ce groupe. Malgré ces éléments, aucun média de grand chemin ne consacrera une ligne à cette militante se faisant passer pour une journaliste.
Journaliste ou antifa, il faut choisir. Se prétendre journalistes et agresser d’autres journalistes, c’est tout simplement scandaleux. Mais comme @InesChopard et @JordanFlrtn appartiennent à la rédac de @BVoltaire, ça n’émeut pas grand monde. Imaginons un instant l’inverse 😱 https://t.co/hvt0BYmFo8
— Gabrielle Cluzel (@gabriellecluzel) February 1, 2023
Prototype médiatique
En conclusion, si l’exemple de Daphné Deschamps et de sa récente fake news sur les saluts nazis est frappant, il n’est pas unique en son genre. De plus en plus, militantisme et journalisme se confondent et finissent par former un prototype médiatique assez inquiétant au sein duquel la frontière entre compte-rendu de l’actualité et manipulation émotive des lecteurs ne forment plus qu’un ; le tout, afin de faire mieux correspondre le réel à une idéologie donnée.
À gauche comme à droite, personne ne semble être épargné par ce phénomène qui se propage à toute vitesse… Un premier élément de réponse à ce paradigme pourrait être, comme le propose l’essayiste Idriss Aberkane, la mise en place d’un « journalisme citoyen » calqué sur les préceptes de la Charte de Munich et où chaque journaliste, s’il ne respecte pas la stricte vérité des faits (mensonges par omission) pourrait se voir destituer de sa fonction…
Évidemment, une telle pratique pourrait, à certains égards, s’avérer mortifère pour certains journalistes, la charmante Daphné en tête.
Geoffroy Antoine