Le dernier chiraquien
« Alternativement, le pays se nourrit d’une pensée de droite et d’une pensée de gauche. Mais, sur 8 millions de téléspectateurs, on a 1,3 million de lepénistes. Ce n’est pas en montant au créneau que l’on va résoudre le problème. Dès que nous attaquons le Front national, nous recevons des tonnes d’appel. Finalement le point principal, c’est la façon dont on analyse l’immigration. Il ne faut pas avoir peur d’expliquer que l’immigration est un problème d’emploi », Libération, 1996.
Robert Lionel Namias, petit-fils d’un juif apatride de Salonique, est né en avril 1944 à Paris. Il est marié à la productrice de télévision Anne Barrère, est père de deux enfants issus de son premier mariage, Fabien (ancien rédacteur en chef des services politique et économique de la rédaction de France 2, et actuel directeur général d’Europe 1), et Nicolas, sorti de l’ENA en 2003, actuel directeur de la stratégie de Natixis et nommé à Matignon en 2012 où il exerce le poste de conseiller technique auprès du Premier Ministre pour le financement de l’économie, les entreprises et les affaires économiques internationales.
Robert Namias est commandeur de la Légion d’honneur et de l’Ordre des Arts et Lettre, il est également Officier de l’Ordre National du Mérite.
Formation
Robert Namias est titulaire d’une licence de lettres et d’un diplôme d’études supérieures en philosophie (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne). Il a rédigé son mémoire de DES sur « la notion de classe chez Marx » (1967).
Parcours professionnel
Robert Namias a brièvement enseigné la philosophie avant de se lancer dans une carrière de journaliste sur les ondes radio de RTL.
1968–1969
Robert Namias entre à RTL en tant que rédacteur et reporter.
1969–1982
Il rejoint la radio Europe 1 où il assure le poste de chroniqueur pour ensuite devenir en 1970 présentateur de journaux et finir par intégrer le service politique en 1971. En 1978, il devient rédacteur en chef, poste qu’il assume jusqu’à son départ d’Europe 1.
En parallèle à ses activités radiophoniques, Robert Namias donne des cours au CFJ durant sept années (1976–1983). Il sera également vice-président de l’école durant quatre ans.
1983
Toujours à Europe 1 il fonde, avec Benoit Clair (journaliste et écrivain), et Alexandre Marcellin, la radio parisienne : 95.2 FM. Il est, de son propre aveu, mis au placard suite à la victoire de François Mitterand à la présidentielle de 1981 :
« C’était un raz de marée après vingt-trois ans de gaullisme. Si vous ne sortiez pas votre carte du Parti socialiste, vous étiez mort […] Pour la première fois, un pouvoir de gauche faisait ce que les gaullistes avaient fait avec les télévisions ».
1984
Robert Namias quitte Europe 1 pour la télévision. Il rentre alors à FR3 en tant que journaliste pour un programme médical ainsi qu’une émission politique « Face à la 3 ».
1986
Il intègre TF1 en tant que journaliste pour l’émission « Médecines à la une », pour ensuite devenir coproducteur de « Santé à la une », rôle qu’il tiendra jusqu’en 1994. Robert Namias est aussi rédacteur en chef et présentateur de « Une première » dès 1987.
1990
Il devient chef du service économique, vie moderne, arts et spectacles de TF1.
1991
Robert Namias est promu directeur-adjoint de la rédaction de TF1. Cette même année, il devient également rédacteur en chef du JT de 20 heures aux cotés de PPDA.
1992
Il devient directeur de la rédaction de TF1, un poste qu’il gardera jusqu’en 1996.
1994
La présidence de la commission interministérielle consacrée à la vitesse et à la sécurité routière est confiée à Robert Namias. Une mission qui donnera lieu à un rapport publié l’année suivante.
1996
Robert Namias est directeur de l’information. En acceptant ce poste, TF1 espère ainsi mettre un homme « pas trop politique, (…) censé laver TF1 de son attachement à Balladur » à la tête de l’information (source : Libération).
2003
Il devient président du Conseil National de la Sécurité Routière (CNRS). Pendant ce temps Anne Barrère, son épouse, est la conseillère personnelle de Bernadette Chirac dans l’opération « Pièces jaunes ».
2005
Robert Namias est nommé directeur-général-adjoint chargé de l’information de TF1.
2008
Robert Namias quitte la direction de l’information de TF1 à 64 ans, remplacé par Jean-Claude Dassier (directeur général de LCI). Au même moment, PPDA est évincé du 20 heures de TF1.
Cette même année Robert Namias rejoint Publicis Groupe en tant que conseiller du président et vice-président de Publicis Consultants.
2009
Robert Namias crée une nouvelle radio d’informations diffusée avec les moyens techniques de Goom Radio (Wikipédia : bouquet de webradios et radios numériques, prestataire de diffusion pour de grandes marques désirant développer une webradio).
Il participe à l’émission « Les grandes voix d’Europe 1 » et est éditorialiste sur i>Télé.
2010
Il démissionne de Publicis.
2011
Robert Namias devient le PDG de l’hebdomadaire L’Hémicycle, un journal d’actualité et de débat pluraliste qui est ouvert à tous les courants politiques. Dans celui-ci nous pouvons retrouver en signature des articles : Michèle Cotta, Brice Teinturier, Éric Fottorino, Philippe tesson, Bruno Jeudy. Il participe aussi à la matinale de LCP.
2013
Le nom de Robert Namias commence à être évoqué pour prendre les rênes du journal Nice-Matin à la place d’Olivier Biscaye en mars. Finalement des désaccords entre Benard Tapie et Robert Namias retarderont cette arrivée.
2014
Il devient le président du directoire et directeur des rédactions de Nice-Matin.
.@NamiasRobert défend @Nice_Matin face aux critiques d’Eric de Montgolfier #nice06 F3 CA http://t.co/kjLfA7rM0Q pic.twitter.com/F9aC8sPJu1
— France 3 Côte d’Azur (@F3cotedazur) 20 Février 2015
“Les comptes ont été redressés, la trésorerie est largement positive et l’entreprise assurée de sa pérennité”, Namias #NiceMatin (AFP) #pqr — Romain Fiorucci (@romainfl) 20 Février 2015
2015
Robert Namias est fait commandeur de la Légion d’Honneur. Il quitte Nice-Matin en septembre 2015 suite à des « ingérences » de la part de salariés-actionnaires. Jean-François Roubaud, membre du conseil de surveillance de la SCIC et journaliste à Nice-Matin expliquait lui de son côté qu’il « n’y a pas eu d’ingérences » mais un « hiatus » sur « l’impératif de transparence » entre le conseil de surveillance et le directeur des rédactions.
2018
Le 28 mars 2018 il prend position sur Twitter contre le CRIF, après que celui-ci ait jugé indésirable la présence de Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon à la marche blanche contre le meurtre antisémite de Mireille Knoll : « Le CRiF ne représente en rien les juifs de France. Il y a bien longtemps que les politiques auraient dû cesser de participer à son dîner annuel. Mondanité politico-médiatique assez ridicule. La lutte contre l’antisémitisme mérite mieux que cela ».
2024
Alors qu’il s’est mis en retrait du journalisme depuis son expérience à Nice-Matin, il se consacre à l’écriture de romans. Sous ce terme flatteur, il est en vérité question de textes de politique-fiction où il agite l’épouvantail d’un triomphe électoral du RN (Le Brun et le Rouge) ou des romans à clés qui lui permettent de livrer son témoignage sur l’actualité politique par procuration (L’affaire Chanteclerc). À travers ce dernier livre, il livre sa vision de l’affaire PPDA, lui qui était directeur de l’information de TF1 au moment où l’animateur était au faîte de sa notoriété. Au micro de France Inter, il rapporte que « [C]e qui m’a beaucoup frappé au moment de l’éclatement de cette affaire, c’est que beaucoup, on dit que tout le monde savait alors que c’est absolument faux. Son coté drague et séduction mielleuse, tout le monde le voyait, mais là, on parle de viols et d’agression sexuelle les plus dégueulasses qui soient. Comment voulez-vous ne pas les croire les témoignages des femmes contre PPDA, il y en a une soixantaine ».
Publications
- « Vitesse et sécurité routière: Rapport au Premier Ministre » – 1er mars 1995 de Robert Namias.
- En 2011, Robert Namias confie vouloir écrire un ouvrage consacré aux médias et la communication. Il déclare vouloir « tout dire », « tout des mensonges, manipulations et autres tricheries dont le milieu de l’information fait l’objet ». Les interviews sur ce futur ouvrage se succédant, les informations également, « la campagne présidentielle de 2007 vue depuis un angle inédit ». Un ouvrage qui devait être édité par Plon mais n’a, semble-t-il, jamais abouti.
- Fake News (avec Michèle Cotta), éditions Robert Laffont, 2020.
- Le Brun et le Rouge (avec Michèle Cotta), éditions Robert Laffont, 2020.
- Mortelles Comédies, éditions de l’Observatoire, 2022.
- L’affaire Chanteclerc, éditions de l’Observatoire, 2024.
Ce qu’il gagne
Non renseigné.
Parcours militant
« L’ancien étudiant soixante-huitard, recruté en 1969 à Europe 1, pour suivre les questions universitaires, fondateur de la section CFDT, a largement viré sa cutie », extrait du portrait de Robert Namias effectué par le journal Libération en 1996.
« En politique, Namias a toujours su adhérer à son époque. En 1974, à Europe 1, il se glissera sans états d’âme au coeur de la machine de guerre giscardienne dirigée par le “général” Étienne Mougeotte. Jeunes et ambitieux, Gérard Carreyrou, Jean-Claude Dassier, Robert Namias, Charles Villeneuve forment l’escadron des “capitaines portugais” en référence à la révolution des œillets qui se déroule alors à Lisbonne », ibid.
« Robert Namias est par ailleurs étiqueté chiraquien, alors que l’amitié entre Martin Bouygues, principal actionnaire de TF1, et le président Nicolas Sarkozy est notoire. Il a présidé le Conseil national de la sécurité routière à partir de 2003, au moment où Jacques Chirac avait fait de la lutte contre la violence routière l’une des priorités de son quinquennat. Et son épouse Anne Barrère était chargée de la communication de l’ex-première dame Bernadette Chirac », Nouvel Obs, 2008.
Collaborations
En 2004, Robert Namias joue dans le film Les Parisiens de Claude Lelouch, où il interprète le rôle d’un patron de presse.
Il a dit
« Je suis pour la tolérance, et contre le racisme », Libération, 1996.
« Alternativement, le pays se nourrit d’une pensée de droite et d’une pensée de gauche. Mais, sur 8 millions de téléspectateurs, on a 1,3 million de lepénistes. Ce n’est pas en montant au créneau que l’on va résoudre le problème. Dès que nous attaquons le Front national, nous recevons des tonnes d’appel. Finalement le point principal, c’est la façon dont on analyse l’immigration. Il ne faut pas avoir peur d’expliquer que l’immigration est un problème d’emploi », Libération, 1996.
« Les amitiés du principal actionnaire de TF1 avec Nicolas Sarkozy, que je respecte, ne me regardent pas. Elles ne jouent en rien sur l’information », Le Monde, 2007.
« Personne n’y croit beaucoup à notre projet de SCIC (Société Coopérative d’Intérêt Collectif), tout le monde est sceptique. Si on ajoute ceux qui espèrent qu’on se casse la gueule et ceux qui ne croient en rien, on n’a que peu de chances de réussir », interview accordée au journal local Le Petit Niçois alors que Robert Namias vient juste d’arriver à la tête du quotidien Nice-Matin, décembre 2014.
« Je n’ai de problème avec personne. Nice-Matin doit être d’une indépendance totale et définitive. Nous n’agirons jamais sous la pression des lobbys. Si ça ne plaît pas aux hommes politiques, tant pis pour eux. Parler de “connivence” en matière journalistique, c’est scandaleux et insultant », interview accordée au journal local Le Petit Niçois en réponse à la question « Quelle attitude avec le monde politique ? », décembre 2014.
« À mon âge, je ne crains plus rien, ni personne », interview accordée au journal local Le Petit Niçois, décembre 2014.
« Europe 1, c’est une fréquence. Une nouvelle radio va s’installer sur cette fréquence, mais ce ne sera plus la radio à laquelle j’ai collaboré », Le Monde, juillet 2021.
« Je ne règle pas mon compte avec l’histoire de PPDA que je trouve absolument abominable et tragique. Mais on a toutes les raisons de croire les témoignages. S’il doit y avoir une vérité, elle ne peut éclater que dans une salle d’audience, mis au-delà de ça, ce qui m’a beaucoup frappé au moment de l’éclatement de cette affaire, c’est que beaucoup, on dit que tout le monde savait alors que c’est absolument faux. Son coté drague et séduction mielleuse, tout le monde le voyait, mais là, on parle de viols et d’agression sexuelle les plus dégueulasses qui soient. Comment voulez-vous ne pas les croire les témoignages des femmes contre PPDA, il y en a une soixantaine », Radio France, mai 2024.
« L’aide médicale d’État est l’honneur de la France. Et une mesure de prévention sanitaire indispensable. Mis à part quelques idéologues, aucun médecin, aucun soignant ne souhaite sa suppression », X, septembre 2024.
Ils ont dit
« “Robert est un beau parleur, et c’est bien utile pour aplanir les problèmes de la rédaction”, commente-t-on dans les hautes sphères de la chaîne (TF1) », Libération, 1996.
« Robert Namias, 52 ans, directeur de l’information, est mis en avant pour tenter d’édulcorer l’image de TF1. Vendeur de sens », ibid.
« Il est censé laver TF1 de son attachement à Balladur. Bon professionnel, il a réussi à faire passer la réorganisation de l’information sans trop de heurts », ibid.
« Rhétorique et volte-face permanente : la méthode Namias est simple », ibid.
« Un autre journaliste, Robert Namias, affirmait pour sa part : « J’ai réécouté la séquence à plusieurs reprises avant d’en être certain : les “gilets jaunes” scandent bien “en Afrique, retournez”. On peut contester la décision du supermarché – et elle est contestable – mais certainement pas de cette manière. A tout point de vue. » Une affirmation inexacte, là encore relayée temporairement avant qu’il ne supprime son tweet et s’excuse de sa « mauvaise interprétation ». Comme on l’entend en effet distinctement sur la vidéo, les manifestants scandent le slogan « Reposez vos articles » et non pas « Retournez en Afrique ». », 20 Minutes, 26/08/2019.
« Il faut croire que je suis de la vieille école et Robert Namias de la nouvelle, bien qu’il ait l’âge d’être mon père. Il est vrai qu’il m’arrive parfois de me demander si je ne me suis pas trompée d’époque. Il est vrai que la jeunesse est un état d’esprit, et au vu de sa récente sortie, si l’âge réel du monsieur est 76 ans, l’âge ressenti, pour parler comme la météo, serait plutôt 14 et demi. Sur son compte Twitter, la journaliste Judith Waintraub rapporte un propos du professeur Raoult tenu sur LCI : « Olivier Véran a l’âge d’être mon fils, donc j’ai beaucoup d’indulgence pour lui. » Robert Namias, journaliste, ancien professeur de philosophie, ayant fait carrière dans les médias privés et publics les plus prestigieux et auréolé du titre de commandeur de la Légion d’honneur, officier de l’ordre national du Mérite, commandeur de l’ordre des Arts et des Lettres, retweete cette citation avec ce commentaire lapidaire : « Sombre connard. Moi je n’ai pas d’indulgence pour mes fils mais de la fierté et de l’admiration », Gabrielle Cluzel, Boulevard Voltaire, 28/05/2020.
Sa nébuleuse
- Patrick Poivre d’Arvor, qu’il considère comme un véritable ami.
- Étienne Mougeotte, journaliste, ancien vice-président du groupe TF1, ancien directeur des rédactions du Figaro et actuel directeur-général de Radio Classique (depuis 2012).
- Jean-Claude Dassier, ancien directeur général de la chaîne d’information en continu LCI et président du club français de football Olympique de Marseille de 2009 à 2011.
- Jacques Chirac et son épouse Bernadette Chirac.
- Nonce Paolini (ancien directeur général délégué de Bouygues Telecom, actuel PDG du groupe TF1).
- Patrick le Lay qui l’a fait entrer dans Nice-Matin au moment de la reprise par Bernard Tapie ; il réalisait pour ce dernier un audit stratégique sur son groupe de presse.
- Bernard Tapie.
- Le Club Averroes
- Le Club de la Presse Méditerranée.
- Ses fils Fabien (ex-directeur de l’information d’Europe 1, sur LCI depuis l’été 2017) et Nicolas (énarque, ex-administrateur de la direction du Trésor de 2004 à 2008, passé à la direction financière de Natixis, ex-conseiller technique économique au cabinet de Jean-Marc-Ayrault de 2012 à 2014, revenu depuis chez Natixis où il est directeur Finance et Stratégie depuis octobre 2017).
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