« Nous avons l’honneur d’être la quintessence du bobo ! »
« Nous avons l’honneur d’être la quintessence du bobo ! », France Inter, jeudi 19 avril 2012.
Thomas Legrand commence sa carrière sur la radio RMC en 1988 comme journaliste politique avant de rejoindre la rédaction de RTL en 1993. Il entre au service Étranger en 1997, avant de devenir grand reporter en 1998. Nommé correspondant permanent à New York entre 2001 et 2005, il y couvre les événements du 11 septembre 2001. À son retour, il est nommé chef du service Étranger à partir de 2006. Il devient ensuite chef du service politique de RTL à partir de 2007 et remplace Alain Duhamel pour l’éditorial politique du matin durant l’été 2008.
C’est en vue de concurrencer le dinosaure Duhamel que la rédaction d’Inter le débauche la même année. Il est marié à l’écrivain et journaliste Laure Watrin, rencontrée à RTL, avec laquelle il a consigné des livres sur le phénomène « bobo » dont ils sont des exemples éclatants.
Pendant quatorze ans, de 2008 à 2022, il présente l’éditorial politique dans la tranche d’information matinale de France Inter.
À partir de la rentrée 2022, chaque samedi après-midi, il est aux manettes de l’émission « En quête de politique », toujours sur Inter, et signe une chronique politique dans Libération, journal qu’il confesse lire « quotidiennement depuis toujours ». Parallèlement, il a toujours participé également à d’autres émissions de la station en tant que commentateur politique, telles que la défunte Comme on nous parle de Pascale Clark.
Thomas Legrand a collaboré au site internet Slate.fr de 2009 à 2013. De septembre 2010 à juillet 2012, il est également responsable des pages politiques du magazine Les Inrockuptibles dont il signe l’éditorial. Il s’en va à l’arrivée d’Audrey Pulvar à la direction.
Le vendredi, il participe régulièrement au club de la presse du Grand Journal sur Canal+.
Fin juin, à l’annonce de l’arrivée d’Audrey Pulvar à la direction des Inrockuptibles, il démissionne de son poste de responsable des pages politiques du magazine.
Portrait vidéo
Formation universitaire
Maîtrise d’administration économique et sociale (Paris 1 – Panthéon Sorbonne).
Parcours militant
Non renseigné.
Publications
- Emmanuel Faux, Thomas Legrand et Gilles Perez, Plumes de l’Ombre : Les Nègres des hommes politiques, Paris, Éditions Ramsay, 1991.
- Emmanuel Faux, Thomas Legrand et Gilles Perez, La Main droite de Dieu : Enquête sur François Mitterrand et l’extrême droite, Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’épreuve des faits », 1991.
- Ce n’est rien qu’un président qui nous fait perdre du temps, Paris, Éditions Stock, 2010.
- Petit dictionnaire énervé de la politique, Paris, Éditions L’Opportun, coll. « Petit dictionnaire énervé », 2010.
- Thomas Legrand et Philippe Bercovici, J’aurais voulu faire Président, Éditions 12bis, 2011.
- Laure Watrin et Thomas Legrand, La République bobo, Éditions Stock, février 2013, 270 p.
- Thomas Legrand, Arrêtons d’élire des présidents !, Éditions Stock, novembre 2014 , 144 p.
- Thomas Legrand, Chronique de l’imprévu, Éditions Stock, septembre 2017, 208 p.
- L’Histoire de la Ve République (BD), avec François Warzala, éd. Les Arènes, 2018.
- Les 100 mots des bobos, avec Laure Watrin, septembre 2018.
Collaborations
- 28 Minutes d’Elisabeth Quin, Arte (invité régulier)
- Auteur, avec Pauline Pallier, du documentaire « Laïcité, 30 ans de fracture à Gauche», diffusé le 28 octobre 2020 sur LCP.
- Conseiller de la rédaction pour le Supplément politique sur Canal + depuis septembre 2013 jusqu’en juin 2016.
- Auteur et narrateur du programme court d’animation Les Clés de la République, qui rend compte aux enfants du fonctionnement des institutions démocratiques, diffusée sur LCP en 2015.
Ce qu’il gagne
Non renseigné.
Il l’a dit
« Hé bien nous sommes les derniers quasiment, parmi les démocraties, à sacrifier à cet exercice de gonflette blindée, cette marche des fiertés régaliennes, ce showroom sur pattes, roulettes ou chenilles, de nos pétoires dernier cri. […] Le défilé militaire national, c’est pour les nations démocratiquement peu sûres, qui ont besoin d’impressionner leurs peuples et leurs voisins. Et en plus ça coute cher ! Voilà un domaine au moins ou les américains sont moins puérils que nous… Peut-être ont-ils d’autres moyens de prouver leur puissance. Les allemands ne défilent plus… et tout le monde trouve que c’est mieux ainsi. Les pays du nord de l’Europe n’y pensent même pas. Sinon, presque tous les pays d’Amérique latine, la Chine, Le Pakistan, la Turquie, la Corée du Nord… ne parlons pas de la Russie tous les 9 mai, font comme nous… », France Inter, 14/07/2022.
« Il y a, spontanément de nombreux volontaires pour l’insertion, l’alphabétisation des migrants. Hallucination d’éditorialiste bobo, bienpensant ? Non, froid (ou plutôt le chaud) constat des acteurs qui organisent ce vaste programme d’accueil. D’ailleurs, en quittant les écrans des chaines boloréïsés, en parcourant plutôt les pages des quotidiens régionaux, donc en s’attachant aux récits du terrain plutôt qu’aux coups de gueule de plateaux, on a, tous les jours, les détails de cette réussite. Non, ces nouvelles ne sont pas assez spectaculaires ni génératrices de clics pour retenir l’attention du débat. C’est une réalité de bas bruit, pas traduisible en clashs tweet ou en bandeaux d’écrans », France Inter, 15/12/2021.
« Sud Radio (audience riquiqui), CNews, grosse audience de niche, mais chaine naine comparée à TF1, France Télé, M6 ; Valeurs Actuelles, qui tire bien moins que Le Point, l’Obs ou l’Express… Éric Zemmour, donc, et son million de téléspectateurs les bons jours, Marion Maréchal (directrice d’école supérieure de l’extrême-droite à moitié vide) ou l’ex-philosophe Michel Onfray (et son site de rencontre des extrêmes) font du bruit, assurent le spectacle antisystème, mais on a tendance à confondre décibels médiatiques et puissance politique, like sur twitter et ancrage idéologique ! La droite hors les murs se répand sur tous ses médias, et au-delà, pour se plaindre que l’on ne peut plus rien dire ! Elle tient un discours paradoxal, à la fois triomphateur et victimaire. Cette extrême-droite réactionnaire, antimoderne, n’est qu’une composante, minoritaire mais intellectuelle, bavarde et infatuée, de la sphère de RN, beaucoup plus large », France Inter, 04/06/2021.
« Un militaire ça ne répond de rien! Un militaire, ça répond aux ordres du pouvoir civil! Et si un jour le pouvoir civil vous demande d’intervenir, vous interviendrez. Vous êtes comme un canon ou un fusil. Vous êtes un outil! Les généraux, ça se tait et ça obéit. C’est ça la démocratie… », échange avec le général Martinez, signataire de la tribune des généraux s’alarmant du « délitement de la France », BFMTV, 27/04/2021.
« Il y a dans le mouvement des gilets jaunes une incapacité à s’exprimer, une incapacité à hiérarchiser ses revendications, une incapacité à dire ce qu’ils veulent. Et quand on ne peut pas exprimer ce qu’on veut dire, on finit par taper. Les enfants, c’est comme ça – je ne veux pas infantiliser les gilets jaunes – mais nous-mêmes, quand on engueule nos enfants et qu’on en a marre, qu’on n’arrive plus à exprimer, on se met… à donner une petite tape », « 24h Pujadas », LCI, 11/02/2019.
« Nous sommes passés d’un état problématique dans lequel la vérité factuelle avait fini par faire office d’opinion comme les autres à un état désespérant où un fait, journalistiquement établi, a moins de véracité qu’un fait ou une opinion qui aura été liké par un nombre important d’internautes. Mais nous aussi, les médias, avons notre part de responsabilité. Quand nous survalorisons les débats clashs, spectaculaires, par rapport aux reportages plus coûteux, quand on érige en porte-parole un gilet jaune pour sa seule gouaille, sans savoir vraiment qui il est… nous réarmons la suspicion généralisée… Un conseil : suivez le site AFP », France Inter, 13/12/2018.
« Il y a des bobos infirmiers, profs, mais aussi web masters ou producteurs télé. Ces différences déroutent les sociologues, qui ont souvent une lecture marxiste. Or les bobos ne sont pas une classe, mais partagent beaucoup de valeurs communes », Le Temps, 22/10/2018.
« Le bobo est à l’aise avec la mondialisation et s’intéresse peu à l’entre-deux, la nation. On parle de «glocalisation»: contraction de global et local. En politique, la droite très conservatrice et une frange de la gauche révolutionnaire reprochent au bobo un manque de nationalisme ou de conscience de lutte des classes… », ibid.
« Les terroristes ont attaqué un quartier qui est vraiment resté, intra-muros, le symbole d’un Paris métissé, progressiste, multiculturel, jeune. Ils ont touché les bobos au cœur de leur territoire, et le ressenti, pour beaucoup, a été la fin de l’innocence bobo… », au sujet des attentats de novembre 2015, ibid.
« Objet décoratif de toutes présidentielles françaises [qui] sera bien là en 2017, comme la dinde à Noël ou la Légion étrangère le 14 juillet », France Inter, 08/3/2017, au sujet du trotskisme, Acrimed 10/3/2017, op.cit.
« Hamon trop à gauche, Fillon trop à droite, offrent plus qu’un boulevard, une piste de décollage pour gros porteurs […] Mais pour bien décoller, ce gros porteur Macron doit équilibrer sa charge entre ses ailes droite et gauche, organiser un peu mieux sa cargaison entre produits périmés ou trop frais », ibid.
« Pour moi, c’était impossible de rester (…) Forcément, elle aura des infos : si elle les dit, elle trahit son compagnon. Si elle ne les dit pas, elle trahit son journal et sa condition de journaliste. (…) On ne peut plus être lu pour ce qu’on écrit. Tout sera forcément interprété ! On a justement un article sur Montebourg, ce mercredi. Et j’ai fait un édito très “anti” Montebourg. C’est le hasard, c’était prévu avant l’annonce de l’arrivée d’Audrey Pulvar. Mais vous voyez bien comment ça va être lu ! (…) Il y a un gros malaise (…) Il ne peut plus y avoir de traitement crédible de la politique aux Inrocks. » Entretien à Télérama, 18 juillet 2012.
« Tout se passe comme si un nouveau problème d’intégration était en train d’apparaître. Non pas un problème d’intégration des immigrés, mais un problème d’intégration des Français de souche vivant dans ces zones rurales ou périurbaines sans étrangers et sans diversité ethnique. » France Inter, 15 mai 2012.
« Le bobo, voilà le nouvel ennemi. Qu’est-ce qu’un bobo pour Marine Le Pen ? Eh bien c’est nous (Patrick, Pascale, Philippe), nous avons l’honneur d’être la quintessence du bobo ! D’ailleurs la dernière fois que la candidate frontiste est venue ici, dans ces studios, ça ne s’était pas très bien passé (à cause d’un échange un peu vif sur la Syrie, je crois, notamment avec notre maître bobo à tous, « l’européo-droit-de‑l’hommiste » Bernard Guetta)… Marine Le Pen avait quitté le studio avec fracas en nous traitant donc de bobos ! Un bobo donc, c’est un urbain, forcément déconnecté des réalités de la vraie France. Le bobo circule en vélib’. » France Inter, jeudi 19 avril 2012.
« Christian Jacob a dit de Dominique Strauss-Kahn sur Radio J, il n’incarne « pas l’image de la France, l’image de la France rurale, l’image de la France des terroirs et des territoires, celle qu’on aime bien, celle à laquelle je suis attaché (…). » C’est donc Christian Jacob, patron des députés de la majorité, qui aura dégainé le premier. Il aura été la première personnalité de droite à utiliser l’argument fétide, l’argument de l’enraciné, du terrien, les pieds dans la glaise de France, les sabots dans cette « terre qui ne ment pas », pour fustiger DSK, le financier hors-sol, le Français de raccroc. » Slate.fr, 16 février 2011.
« La France est de moins en moins raciste, les mariages mixtes sont en forte augmentation, l’idée de donner le droit de vote aux immigrés extra-européens pour les élections locales est maintenant majoritaire. Le plus gros succès de librairie du moment est le fait de Stéphane Hessel, l’un des fondateurs de RESF (Réseau éducation sans frontières). En pleine crise économique et sociale, il ne vient à l’idée de personne de dire que ce sont les étrangers qui nous piquent nos emplois. Ce sont les emplois qui partent à l’étranger. Marine Le Pen ne peut plus dire “4 millions d’immigrés, 4 millions de chômeurs”, comme son père le disait jadis (avec 2 millions).
Pour croître et prospérer, le FN doit dénoncer les musulmans et récupérer, en le dévoyant, le principe de laïcité, principe que Jean-Marie Le Pen, longtemps promoteur d’une France fille aînée de l’Église, exécrait. Le FN ne va pas trop mal en tant qu’organisation, mais ses idées originelles ne gagnent pas en France, contrairement à ce qu’une observation sommaire et pessimiste de la situation pourrait laisser croire. » Les Inrockuptibles, 12 janvier 2011.
«Dans une famille de 8 enfants où tout le monde vote, c’est comme une mini-démocratie, s’amuse-t-il. Ce qui m’intéresse dans la politique comme journaliste, c’est la cohérence des propos tenus qui ne change pas à 360° selon l’air du temps : la rigueur constitue une valeur positive », Le Nouvel Économiste, 27/04/2010.
« Finalement, ce n’est pas la peine de s’interroger sur l’identité nationale ou l’«identité de la France» (pour prendre un terme plus acceptable parce que validé par Fernand Braudel). Ce n’est pas la peine, puisque notre identité, c’est la République. » Slate.fr, 27 décembre 2010.
Sa nébuleuse
Élisabeth Quin, Patrick Cohen, Laure Watrin. Hélène Jouan (qui le fait « entrer » à Inter).
Ils l’ont dit
« De la même manière qu’elle goûte difficilement les génuflexions repentantes de la France vis-à-vis du gouvernement algérien, Marine Le Pen digère difficilement les allégations du président Macron à propos du Rwanda. Pour Thomas Legrand, le président Macron a choisi “la vérité”, Marine Le Pen “le mensonge”. Étrangement, l’éditorialiste ne dit pas un mot de Hubert Védrine qui considère pourtant, comme Le Pen, que “ce débat empoisonné (autour du Rwanda) est un bon révélateur du degré de masochisme atteint dans notre pays”. En réalité, Legrand n’a pas voulu griller la politesse à la géo-politicienne-humoriste-toujours-du-bon-côté Sophia Aram qui, une heure plus tard, dénoncera le “révisionnisme” de l’ancien ministre des Affaires étrangères à qui elle reprochera surtout d’avoir eu un entretien avec la revue Éléments. Voilà ce qu’on appelle un excellent travail d’équipe », Causeur, 08/06/2021.
« Thomas Legrand n’est pas seulement journaliste politique : il est aussi « l’éditorialiste politique qui s’invite chaque matin à la table du petit déjeuner ». Il est exactement l’unique titulaire de la chaire d’éditorialisme politique dans la « matinale » de France Inter qui lui confie – c’est son titre – « L’édito politique ». Seulement voilà, à la différence des médias d’opinion, comme le sont Libération ou Le Figaro, France Inter n’est pas ou ne devrait pas être un média de parti pris et Thomas Legrand ne devrait pas rivaliser avec Laurent Joffrin », Acrimed, 10/3/2017.
« Misère du journalisme politique. Qu’avons-nous appris ? Rien ou presque, hormis les partis pris d’un journaliste politique. Entre métaphores douteuses, mépris à l’égard des petits candidats et macronite aiguë, Thomas Legrand a quitté la chaise de l’arbitre pour participer à la course, et frise le faux-départ. Est-ce dû à un entraînement intensif aux côtés de ses confrères éditorialistes avec qui il semble partager les mêmes constats, dopés à la sondomanie ? », ibid.
« Pourtant, c’est rien qu’un éditorialiste qui cherche à faire son job, et qui ne se voit pas accoudé au même bar des brèves politiques dans quarante ans comme son aîné Alain Duhamel. On verra. Question de génération encore », Le Nouvel Économiste, 27/04/2010.
Photo : fondapol (cc)