In nomine Patris et Figaro
Inlassablement, le nouveau directeur du Figaro remet son ouvrage sur le métier pour dénoncer les méfaits de l’immigration, de l’interventionnisme et des dérives sociétales qui scandent l’actualité française. Si l’homme fait partie, telle une commode Louis XV, des meubles du Figaro où il est entré en 2001, il en est désormais le porte-parole médiatique attitré à la télévision et à la radio à la faveur de la « bollorisation » du paysage médiatique. Le temps des débuts du Figaro Vox et des procès en extrémisme qui lui étaient intentés semble bien loin. En un peu moins de dix ans, il aura œuvré à l’éclosion de personnalités aussi incontournables qu’Eugénie Bastié, Alexandre Devecchio, Mathieu Bock-Côté ou encore François-Xavier Bellamy. Comme pour son père, Jacques, l’horizon désirable demeure une révolution conservatrice et providentielle. Mais qui sera le nouveau champion du Figaro après Fillon, Bellamy ou Zemmour ? Affaire à suivre…
Fils de Jacques Trémolet de Villers, avocat de sensibilité catholique et monarchiste, ancien collaborateur de Tixier-Vignacourt ayant notamment défendu Paul Touvier lors de son médiatique procès. Entre 1981 et 1997, celui-ci a dirigé l’ICTUS (Institut culturel technique d’utilité sociale), un institut de formation des élites traditionaliste. Il était en première ligne lors de l’opposition à la loi Taubira et on lui doit même l’invention du terme « printemps français ». Héritier d’une famille de la noblesse, dont les racines sont plantées en Auvergne et en Corse, le grand-père paternel de Vincent Trémolet de Villers fut député de Lozère et maire de Mende tandis que la grand-mère, Jeanny Battesti, a été directrice d’école à Bastia.
Formation universitaire
Vincent Trémolet de Villers a étudié à l’Institut de criminologie de Paris II Assas où il obtient un diplôme universitaire de troisième cycle en 2001 sous la direction de Xavier Raufer et de François Haut. Son mémoire est intitulé « Les “zones de non-droit” dans la République Française, mythe ou réalité ? » et semble porter en germe les préoccupations qui seront celles du Figaro Vox quelques années plus tard.
Parcours professionnel
- 1996 : il entame sa carrière de journaliste au sein de Spectacle du Monde, propriété du groupe Valmonde au même titre que Valeurs Actuelles.
- 2001 : il contribue à la création du Figaro Hors-Série dont il devient le rédacteur en chef.
- 2011 : rédacteur en chef du Figaro Histoire
- 2013 : rédacteur en chef des pages Débats et Opinions du Figaro, la plateforme de Débats et d’Opinions du Figaro.
- 2014 : il est nommé à la tête du Figaro Vox, extension numérique des pages Débats et Opinions, sur une idée de Patrick Buisson et d’Alexis Brézet.
- 2018 : directeur adjoint la rédaction du Figaro, en charge des rubriques Politique, Société et Débats-Opinion. Il intervient en tant que débatteur sur LCI.
- 2022 : il rallie Europe1 aux côtés d’Alexis Brézet en tant qu’éditorialiste. Ils présentent en alternance l’édito politique de la matinale.
- 2023 : promu directeur délégué de la rédaction du quotidien, dont il est chargé de définir « la mise en œuvre des orientations stratégiques».
Publications
- Et la France se réveilla : Enquête sur la révolution des valeurs, avec Raphaël Stainville, éditions du Toucan, 2013.
- Les grands duels qui ont fait le monde, ouvrage collectif co-dirigé avec Alexis Brézet, Perrin, 2016.
- L’Éloge de la politique : Les grandes œuvres, de Platon à Soljenitsyne, Taillandier, 2020.
Il l’a dit
« La vérité est que le chef de l’Etat est le représentant ultime d’une génération politique fascinée par Mitterrand et qui, sans avoir ni sa finesse, ni sa culture, a confondu le cynisme et le talent, désappris tout ce qui ressemblait à de la loyauté, du courage, de la profondeur et en est réduite aux déclarations d’estrades, au serment de canton, aux complots d’arrière-boutiques. Un machiavélisme middle-class. Tout cela n’est pas nouveau, mais sans invoquer les grandes vertus, il est juste de rappeler que cette génération n’a cessé, elle, de la faire, la morale. Qu’elle a dit le bien et le mal. Sans nuance et sans précaution, elle est la reine de l’invective, de l’anathème, de la condamnation. De Théâtre du Rond-Point en concerts solidaires, elle a passé trente ans la main sur le cœur. Était-il sec ? Les sans- dents, les sans-influence, les sans-combines, les sans-carrières connaissent désormais la réponse », Le Figaro, 03/09/2014.
« En sachant que notre objectif était inaccessible parce que l’imperfection est le propre du journalisme, nous avons voulu apporter, à notre petite mesure, une forme de controverse où la raison prime sur l’émotion, où la variété des points de vues peut se manifester sans agressivité, où les convictions sont franches sans que le manichéisme ne règne en maître, où les spécialistes éclairent nos zones d’ombres de leur connaissance, où les polémistes trouvent dans l’actualité une source inépuisable d’inspiration », Le Figaro, 04/02/2015.
« On a aussi bénéficié d’un phénomène qui nous dépasse, admet toutefois Vincent. Le débat s’est déplacé : l’Obs comme Le Monde sont devenus un peu indiscernables, et un certain nombre de figures qui participaient au débat chez eux viennent davantage chez nous aujourd’hui […] Sur la réforme du collège, s’enthousiasme-t-il, on a eu tous les fameux “pseudo-intellectuels”, qui écrivaient jusque-là plutôt dans Le Monde : Fumaroli, Finkielkraut, Julliard, Bruckner, Ferry… », Causeur, 13/05/2016.
« Quand on vit au cœur de Paris, il est aisé d’affirmer que l’immigration est une chance, de proclamer sur un plateau de télévision que notre tradition d’accueil oblige à ouvrir nos ports aux bateaux de migrants, qu’il s’agit d’ailleurs de chiffres dérisoires et qu’au fond il n’y a pas de crise migratoire. Au nord du périphérique pourtant, en Seine-Saint-Denis, la crise migratoire est telle que la puissance publique elle-même est incapable de donner le nombre d’habitants », Le Figaro, 04/07/2018.
« Complotiste à casquette, fonctionnaire sans mission, politicien sans parti… ces figures qui ont émergé aussi vite, sur nos écrans, que des stars de la télé-réalité vont connaître la brutalité des disgrâces médiatiques. Bientôt les « gilets jaunes » seront pliés au fond du coffre de la voiture. Enfin ! Ce mouvement, ivre de lui-même, avait pris un tour vain et mortifère. Spontané, frénétique, insaisissable, il a pourtant bousculé en six semaines nos institutions politiques, médiatiques, syndicales et économiques. En une impressionnante catharsis collective, dans la violence et le désordre, la France a mis au jour les maux qui la hantent: taxes écrasantes, normes absurdes, rivalités sociologiques, concurrence géographique, tourments identitaires, déclassement économique… », Le Figaro, 16/12/2018.
« C’est-à-dire que pour que le gouvernement ne soit coupable de rien, pour qu’il n’y ait aucun problème dans ce qu’ils ont fait, tout doit être mis sur 10% de la population et on utilise la colère des gens contre cette population. Et après, on dénonce le populisme comme l’expression des colères et des peurs. […] Il faut faire attention à ce qu’on dit. Et quand on sait qu’il y a des millions de Français qui sont à cran et qu’on est chef de l’Etat, on est dans la retenue. On ne souffle pas sur les braises. On a l’impression que si vous voulez créer des manifestations et un petit chaos pour montrer que le chef de l’Etat est là pour protéger de ce chaos, on ne ferait pas autrement », LCI, 06/01/2022.
« Quand la droite rase les murs, baisse les yeux, de crainte d’être assimilée au Rassemblement national avec lequel elle ne compose pas et qui, tranquillement, la dépèce, la gauche négocie avec Philippe Poutou, Sandrine Rousseau, investit Taha Bouhafs et Aymeric Caron en invoquant le Front Populaire et François Mitterrand », Le Figaro, 04/05/22.
« C’est pour moi un mystère que je n’ai pas réussi encore à percer, qui me fascine et m’attriste à la fois. Comment la retraite peut être l’obsession d’un pays comme le nôtre ? C’est vraiment quelque chose qui reste sidérant », Le Figaro, 26/01/2023.
Vie privée
Fruit d’une famille nombreuse, il a cinq sœurs et trois frères. Il est père d’un garçon, Raphaël, et d’une fille, Mayalène Trémolet de Villers, journaliste en alternance à Europe 1. Il réside à Viroflay, en périphérie de Versailles.
Sa nébuleuse
Patrick Buisson dirigeant de Valeurs Actuelles de 1987 à 2000 et directeur de la chaîne Histoire, l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy conserve une influence importante au Figaro. Représentant tout désigné des lignes buissoniennes et zemmouriennes du quotidien, Trémolet de Villers peut être considéré comme son fils spirituel. Un papier hagiographique qu’il consacre à l’oraculaire stratège politique laisse transparaître toute l’admiration qu’il lui voue : « animal politique singulier », « autorité irrésistible », « redoutable éloquence ». L’avocat de Buisson, Gilles-William Goldnadel fut un des premiers contributeurs du Figaro Vox.
Alexis Brézet, journaliste à Valeurs Actuelles lorsque l’hebdomadaire était dirigé par Buisson. Les deux hommes ont toujours conservé une indéniable proximité, dont il est permis de penser qu’elle a infléchi la ligne politique du Figaro. Pour Buisson, l’homme « possède un sens aigu de l’analyse politique, qui repose sur une culture nourrie à l’histoire, et échappe ainsi aux fantasmes de la fabrique médiatique ». En outre, Trémolet de Villers est l’auteur de la Lettre de M. de Rastignac, une des plus anciennes rubriques de Valeurs Actuelles, autrefois assurée par Alexis Brézet qui a passé la main à son comparse.
Marie-Laetitia Bonavita, passée par Assas et Valeurs Actuelles, elle a longtemps été un des piliers des pages Débats du Figaro avant d’être affecté à l’interview de la dernière page.
Paul-Henri du Limbert, ancien directeur délégué des rédactions, décédé en 2018, a également pris une grande part au lancement du Figaro Vox.
Raphaël Stainville, ancien du Figaro qui dirige actuellement le service politique de Valeurs Actuelles. Les deux journalistes ont écrit un essai à quatre mains. Raphaël Stainville est marié à l’une des sœurs de Vincent.
François-Xavier Bellamy, député européen, et Gaspard Koenig, philosophe libéral qui n’a pas pu se présenter à l’élection présidentielle de 2022, faute d’avoir obtenu les parrainages nécessaires, ont été propulsés par le Figaro Vox. « On a eu le souci de faire émerger des gens, en donnant leur chance à des petits jeunes, comme Bellamy ou Koenig […] Ce sont des gens diplômés, qui existaient et avaient un potentiel, mais à qui on a donné une visibilité »
Depuis 2021, il préside le prix littéraire Aujourd’hui. Parmi les jurés, Sonia Mabrouk, Alain Duhamel, Franz-Olivier Giesbert ou encore Anna Cabana.
Ils l’ont dit
« Un ancien du Figaro le décrit comme “curieux”, “agile”, “très drôle” et “très, très à droite”. Sa famille l’est – son père était un avocat monarchiste », L’Obs, 21/11/2016.
« Les chefs sont des gens à particule, bien élevés, très cultivés. Mais on s’emmerde comme des rats morts », un journaliste du Figaro cité dans Libération, 24/08/2018.
« Les derniers recrutements m’y semblent assez droitiers, raconte un journaliste. On y retrouve des “redede” à particule ou des petits cathos bien comme il faut. Il n’y a pas une diversité folle […] Quand on a vu débarquer cette bande-là, on a tout de suite eu l’impression qu’ils étaient chez eux », dit un membre de la rédaction. « Ils sont en train d’appliquer au Figaro la théorie du grand remplacement », Libération, 16/11/2021.
« Le 1er décembre, au lendemain de la diffusion de sa vidéo d’entrée en campagne [de Zemmour], il y avait au moins trois signatures (Vincent Trémolet de Villers, Guillaume Tabard, Alexandre Devecchio), dans le journal et sur France Inter, pour trouver qu’il y parlait juste. Depuis, les éditoriaux indulgents se sont succédé sans discontinuer. “J’aimerais que vous preniez acte que toute la rédaction n’est pas passée à l’extrême droite”, supplient cependant nombre de journalistes avec lesquels nous avons échangé, requérant l’anonymat qu’ils estiment nécessaire pour pouvoir s’exprimer librement », Le Monde, 18/12/2021.
Illustration : capture d’écran vidéo Europe 1 via YouTube.