D’ici fin avril, les 100 salariés de Sophia Publications devraient être fixés sur les chances du tandem Maurice Szafran / Thierry Verret / Gilles Gramat de reprendre la société à Artemis, la holding personnelle de François-Henri Pinault. Elles semblent certaines, compte tenu d’au moins trois éléments.
L’ancien PDG de Marianne (remercié le 12 novembre 2013) et l’actuel patron des éditions scolaires Ophrys et de l’hebdomadaire Le Phare de Ré ne sont pas intéressés par hasard par ce petit groupe, éditeur de marques de presse culturelle renommées. Elles se déclinent en quatre mensuels sur trois domaines : les questions historiques avec L’Histoire et Historia, les sciences avec La Recherche, enfin les livres avec Le Magazine littéraire. En premier lieu, Maurice Szafran connaît bien le périmètre cédé. Il a multiplié les partenariats de hors-séries entre Marianne et ces titres, notamment depuis 2008. Autre exemple d’une porosité réelle entre Sophia et Marianne, de 2008 à fin 2013, Joseph Macé-Scaron, a occupé conjointement les fonctions de directeur adjoint de la rédaction du newsmagazine et de rédacteur en chef du Magazine littéraire. Il était logique qu’Artémis s’adresse à Maurice Szafran pour la cession, également parce qu’il est proche de la famille Pinault. François, conjointement à Martin Bouygues, avait prêté environ 10 millions de francs pour le lancement de Marianne en 1997. Patricia Barbizet, DG d’Artémis, est, de surcroît, une amie de Szafran. Au sein de la holding, il connaît bien aussi Carole Ferrand, la veuve d’Olivier (fondateur de Terra nova), directrice des participations.
En second lieu, le trio qu’il forme avec Verret et Gramat inspire confiance. Verret et Szafran ont travaillé ensemble dans les années 90 à l’époque de, feu, l’hebdomadaire L’Evénement du Jeudi. Maurice Szafran en était le rédacteur en chef, Thierry Verret, le directeur général. De leur côté, Gilles Gramat, gérant associé du fonds d’investissement Pragma capital, et Verret seraient des amis depuis 35 ans. Pragma a accompagné Verret dans la plupart de ses deals, des éditions Lamarre à La France agricole.
Enfin, un dernier paramètre donne toutes ses chances à leur proposition de rachat. Depuis qu’il a repris l’empire de son père en 2003, François-Henri Pinault, n’a jamais caché vouloir se débarrasser de ses actifs dans la presse. Contrairement au newsmagazine Le Point et au quotidien économique numérique L’Agefi, qui jouissent d’une influence réelle auprès des élites politiques et économiques, Sophia publications ne possède pas cet atout. De surcroît, la société, qui emploie environ 100 salariés, a tout juste été à l’équilibre en 2013. Elle a réalisé moins d’un million d’euros de résultat net pour 21 millions d’euros de CA. L’année dernière, la diffusion des quatre titres a reculé, de 4,6% pour L’Histoire (DSH OJD : 52 258 exemplaires) à 10,9% concernant Historia (DSH OJD : 65 870 exemplaires). Le Magazine littéraire (DSH OJD : 27 551 exemplaires, ‑10,6%) et La Recherche (DSH OJD : 34 849 exemplaires, ‑6,7%) se situent au milieu de cette fourchette. Côté publicité, le recul a été d’environ 7% en 2013. Les recettes numériques, qui ont représenté seulement 500 000 euros en 2013, nécessiteraient de lourds investissements pour permettre de compenser la baisse sur les métiers historiques. Artémis n’y est pas prêt et préfère se séparer de sa micro-niche si les propositions du trio lui agréent.
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