Un homme blond légèrement dégarni et au regard bleu acier vous dévisage. Il dirige deux doigts vers ses yeux, l’air de dire « Fais bien attention je t’ai à l’œil ». S’agit il du directeur de la CIA, dont un ancien agent fait main basse sur la presse dans les Balkans ? Ou bien du directeur de la NSA, l’agence américaine aux grands yeux et aux grandes oreilles, employant plus de 20 000 personnes et dont le budget dépasse largement les dix milliards de dollars ? Non, c’est Vladimir Poutine qui jette ce regard inquiétant sur la couverture du numéro du 20 septembre 2017 de l’hebdomadaire du charmant milliardaire Pigasse. Poutine dont la stratégie d’influence est détaillée dans un papier involontairement comique du numéro. Florilège.
Sachez le « Vladimir Poutine s’invitera bientôt dans votre salon », il vient d’arriver en parachute, vous le voyez déjà là, mâchoires serrées, l’air pas commode. Le même Poutine qui en 2013 annonçait (le fourbe) ses sombres desseins dans une salle rappelant « la war room bondée du Docteur Folamour de Stanley Kubrick ». La war room ce sont les studios de Russia Today (RT) à Moscou. Puisqu’il y une war room, ces russes doivent bien préparer la guerre… Et puis ces gens là « insistent en permanence sur des sujets qui ont pour but de susciter l’anxiété », ânonne une obscure professeur d’études russes de Rennes. Car ils veulent « déstabiliser la société, créer de l’insatisfaction et instrumentaliser la droite dure et le FN », rien que ça. Et même « préparer le terrain pour la future élection présidentielle » (de 2022 note de la rédaction). On reconnaît là les fantasmes thérapeutiques qui ont suivi l’élection de Trump et le complotisme autorisé : Clinton ne pouvait pas perdre, Clinton ne devait pas perdre, si elle a perdu c’est que le Kremlin a manipulé l’élection et ils vont faire la même chose en France. Fermez le ban ? Oh non car le CSA veille !
Le CSA qui a autorisé RT France en décembre 2015 à émettre non sur le réseau hertzien mais sur le réseau numérique « a placé le site sous surveillance » car « nos homologues en Europe nous ont alertés sur des contenus qui pouvaient être potentiellement problématiques ». Un traitement particulier dont sera exonéré Arte la chaine franco-allemande, véritable instrument de propagande.
Et puis certains journalistes auraient animé « deux sites jugés conspirationnistes et proches de la mouvance Dieudonné/Alain Soral », une réputation bien « sulfureuse ». Pour mémoire le soufre signale l’odeur du diable. Malheureuse Amélie qui signe cet amoncellement de poncifs. Donnons lui une chance de se rattraper avec au choix un reportage sur les médias financés directement ou indirectement par le département d’État américain ou bien une enquête sur la French American Foundation et son programme Young Leaders dont Emmanuel Macron et Édouard Philippe font partie. Pas sur les Inrocks bien entendu. Sur RT ?