Le mensuel Têtu, icône de papier de la communauté homosexuelle, vient une nouvelle fois d’être placé en redressement judiciaire. Son petit concurrent, Yagg.com, souffre également.
Avec encore 600 000 euros de déficit en 2014 (pour 2,8 millions d’euros de chiffre d’affaires), la société Communication presse publication diffusion (CPPD), qui publie Têtu, s’est déclarée en cessation de paiement et a été placée en redressement judiciaire le 1er juin. Premier responsable du marasme, le canal de la diffusion qui continue à s’effilocher. En 2014, le mensuel a encore perdu près de 9%. Les ventes ont régressé à 31 000 exemplaires en dépit d’une nouvelle formule moins “communautaire” réalisée à l’été 2013, peu après le rachat du journal à Pierre Bergé par Jean-Jacques Augier. Elles se situaient à plus de 40 000 exemplaires deux ans plus tôt. La vente d’exemplaires numériques au travers de Tetu.com n’a aucunement pris le relais puisque le site Internet, gratuit, reste entièrement tourné vers la publicité. Second axe de difficultés : la publicité, précisément. Représentant un tiers des recettes, cette dernière aurait chuté d’environ 10% l’année dernière. Augier cherche à présent un repreneur d’ici quatre mois, faute de quoi, la CPPD sera liquidée. L’homme d’affaires, qui a été trésorier de la campagne de François Hollande en 2012, avait pourtant restructuré Têtu à la hache au moment de sa reprise. Les deux tiers des effectifs du mensuel, soit 20 salariés sur une trentaine, avaient quitté le journal. Tous les contrats fournisseurs avaient été renégociés et une partie des fonctions du journal avaient été sous-traitées.
Le malaise qui frappe Têtu illustre la difficulté des médias gay à trouver leur modèle économique dans un marché baissier. Ainsi, le pure player Yagg.com, un temps associé à Têtu sur la partie numérique, a lui aussi été en déficit en 2014. Le site, qui annonce 450 000 visiteurs uniques mensuellement, tente désormais de trouver l’équilibre grâce à l’abonnement. Avec une partie de son contenu rendu payant depuis début juin, Yagg.com espère séduire entre 2000 et 3000 abonnés d’ici 2016. Le site, créé en 2008, compte, par ce biais, revenir à l’équilibre dès cette année.
Le souhait, de plus en plus frappant, d’une intégration de la communauté homosexuelle au sein du reste de la société est manifestement un sérieux handicap pour la pérennité de ses propres supports d’information.