Chacun connaît la devinette enfantine, pince mi et pince moi sont dans un bateau, pince mi tombe à l’eau, qu’est ce qui reste ? Réponse « pince moi » et le répondant est pincé par celui qui pose la question. Qui pincera qui entre Prisma premier groupe de magazines en France (Voici, Gala Télé-Loisirs, Femme actuelle et bien d’autres) et la messagerie en déconfiture ? Et qui se noiera ?
Je te tiens, tu me tiens par la barbichette
Cet article commencé par une devinette peut bien se poursuivre par une comptine. Le groupe Prisma média est la filiale française du groupe allemand Bertelsmann (premier groupe européen de communication (RTL, M6, Penguin Random House et beaucoup d’autres) via la société Gruner+Jahr. C’est aussi – de par son nombre de titres en France – le premier client de Presstalis, le plus engagé, celui qui détient les créances les plus importantes sur la messagerie avec un risque croissant de les perdre en tout ou en partie.
D’autant (source Lettre A du 4 mars 2020) que Prisma a assuré partiellement les fins de mois de Presstalis en 2017 avec une avance de 17M€ dont il est certain qu’elle ne sera jamais recouvrée. Que peut faire devant une telle situation Rolf Heinz, le puissant patron de Prisma ?
Discrète retraite sans flambeaux
Tout d’abord, quitter la direction du navire qui coule en démissionnant du conseil d’administration maintenant dominé par Louis Dreyfus du groupe Le Monde, voir notre article sur le sujet. Démission entérinée en février 2020. Ensuite, informer les salariés du groupe que le premier semestre 2020 serait « très dur », pour les préparer à des mesures qui pourraient être sévères. Si Presstalis boit le bouillon c’est a minima une perte sèche supérieure à 20M€ pour Prisma, en sus des 17M€ évaporés du prêt de 2017. Papa Bertelssmann ne sera sans doute pas très content.
Enfin en diminuant progressivement le risque ou du moins en ralentissant sa croissance. La situation est paradoxale, plus Prisma vend à travers la distribution de Presstalis plus la dette de la messagerie augmente et plus le risque d’impayé croît dans les mêmes proportions. C’est pourquoi Prisma repousse la parution de numéros spéciaux, de suppléments et autres hors-série. L’autre moyen c’est de diminuer le prix de vente des magazines, au moins pour un temps. Les heureux lecteurs de Télé-loisirs n’ont payé que 0,9€ (au lieu de 1,40€) leur guide sur deux numéros de février, de même pour certains numéros de Gala (2€ au lieu de 3€). Le signataire de cet article – à regret — n’a pu profiter de cette offre exceptionnelle.
Mais, comme la marge de Presstalis est calculée en partie sur ce prix, en diminuant le prix de vente l’éditeur diminue de facto la marge brute de la messagerie, la fragilisant encore plus. Surtout si d’autres éditeurs suivent le mouvement. Nous donnons rendez-vous à tous les participants au grand jeu Presstalis après les élections municipales, quotidiens, magazines, imprimeurs, éditeurs, journalistes. Le match reprendra et il y aura des morts.
Sur la lutte entre les quotidiens et les magazines autour de la chute de Presstalis, voir le communiqué du SAEP (syndicat des éditeurs de presse, qui défend les magazines).