Alors que Facebook veut à la fois lancer une monnaie et un tribunal international établissant une vérité universelle, certains législateurs américains veulent limiter le pouvoir des GAFA et leur imposer un début de transparence quant à la valeur économique des données individuelles collectées.
Combien vaut une donnée recueillie gratuitement puis revendue ?
Vous achetez un maillot de bains sur Amazon, vous êtes identifié comme susceptible d’acheter des articles de piscine ou de plage. Vous mettez une vidéo de votre famille autour d’un barbecue sur Facebook, vous pouvez être client pour des articles de jardin. Vous publiez sur Instagram une photo avec votre chien et votre chat, vous pouvez devenir client d’aliments pour animaux ou de clinique vétérinaire. Toutes ces données sont archivées, compilées, croisées pour définir votre « profil consommateur ». Un profil qui vaut de l’or à l’heure de la publicité numérique individualisée.
Le marché implicite : vous utilisez gratuitement les GAFA et en échange vous leur donnez tout détail utile économiquement (et parfois politiquement) sur votre vie.
Un projet de loi décapant
Les sénateurs américains Mark Warner (démocrate) et Josh Hawley (républicain) ont annoncé fin juin 2019 leur intention de déposer une proposition de législation obligeant les grandes plates formes Facebook, Google et Amazon à révéler la valeur marchande des donnés individuelles. Dans un entretien à Axios, Mark Warner precise « Les gens ne réalisent ni combien de données sont stockées ni leur valeur marchande ».
La valeur d’un profil est évaluée entre 5 et 20 dollars américains (compter 15% de moins en euros), nettement plus pour les CSP+ les plus à l’aise. En pratique vous ne pourriez pas réclamer une partie de cette somme. Mais tous les trimestres vous recevriez le type de données recueillies sur vous-même, comment elles ont été utilisées et une évaluation de leur valeur économique.
La loi s’appliquerait aux plates formes ayant plus de 100 millions d’utilisateurs mensuels, excluant les sociétés de taille moyenne. Les sociétés concernées devraient faire un rapport annuel précisant la valeur des données recueillies, quel revenu est généré par utilisateur, et les mesures prises pour protéger ces données. Elles devraient également fournir à leurs utilisateurs un outil pour supprimer tout ou partie des données les concernant.
Il est douteux que les géants concernés souhaitent révéler ce qui se passe dans les soutes fort lucratives où s’échangent les données. C’est le cœur de leur modèle qui est mis à jour. Les deux sénateurs menacent : mieux vaut un coup de projecteur qu’un démantèlement.