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Quand l’Open Society Foundations fait la promotion d’un autre récit sur la migration en Italie

28 novembre 2022

Temps de lecture : 8 minutes
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Quand l’Open Society Foundations fait la promotion d’un autre récit sur la migration en Italie

Temps de lecture : 8 minutes

Le récent débat sur l’accueil des migrants à Toulon a permis de mettre en lumière tout un écosystème favorisant une immigration clandestine massive en Europe. Cet écosystème bénéficie d’une grande bienveillance de la part des médias de grand chemin. Cette bienveillance n’est pas le fruit du hasard : elle tire son origine dans une stratégie visant à influencer les journalistes et leur présentation de l’actualité migratoire au grand public. Nous nous attardons aujourd’hui sur le cas de l’Italie, où l’Open Society Foundations finance des actions visant à influencer la narration de la migration par les journalistes.

L’OSF et les politiques de migration « dignes et effectives »

Dans un arti­cle du 7 avril 2017 pub­lié sur son site insti­tu­tion­nel, l’Open Soci­ety Foun­da­tions (OSF) pré­cise qu’elle ne sub­ven­tionne pas les ONG qui opèrent en mer Méditer­ranée. Mais la fon­da­tion créée par George Soros indique soutenir des organ­i­sa­tions qui mili­tent pour des poli­tiques de migra­tion « dignes et effec­tives ». Les médias ne sont pas en reste : « nous soutenons les acteurs qui cherchent à présen­ter les faits et les évi­dences sur ce qui cause la migra­tion, com­ment cela affecte la société et quelles poli­tiques appor­tent les meilleures solu­tions ». Ce « sou­tien » est par­ti­c­ulière­ment mar­qué dans le pays qui voit arriv­er sur ses côtes le plus grand nom­bre de clan­des­tins en Europe : l’Italie.

Soros et les ONG

La stratégie d’influence de George Soros via l’Open Soci­ety Foun­da­tions n’est plus à démon­tr­er. Nous ren­voyons nos lecteurs aux enquêtes appro­fondies qui font référence en la matière (enfin, pas à gauche, bien évidemment) :

En 2018, le jour­nal Valeurs actuelles pub­li­ait un dossier doc­u­men­té sur « le mil­liar­daire qui com­plote con­tre la France ».

La même année, Pierre-Antoine Plaque­vent pub­li­ait l’essai inti­t­ulé « Soros et la société ouverte, la métapoli­tique du glob­al­isme », dans lequel il fait une radi­ogra­phie détail­lée de la méthodolo­gie Soros et de ses dif­férents champs d’action dans le monde. Pierre-Antoine Plaque­vent a égale­ment mis en ligne sur le site Strate­gi­ka une enquête appro­fondie sur les navires-ONG en Méditerranée.

On ne peut égale­ment pas faire l’impasse sur le tra­vail de recherche que réalise depuis plusieurs années Thibault Ker­lirzin sur George Soros (lire notam­ment « Soros l’impérial » paru en 2019) ain­si que sur le lob­by­ing de nom­breuses ONG auprès de la Com­mis­sion européenne.

Nous nous attarderons aujourd’hui plus par­ti­c­ulière­ment sur le finance­ment revendiqué par l’OSF de 2 organ­i­sa­tions ital­i­ennes : Car­ta Di Roma et le site web Open Migra­tion.

Carta di Roma veille à la bonne conduite des journalistes italiens

Car­ta di Roma est une asso­ci­a­tion ital­i­enne fondée en décem­bre 2011. Le dernier bilan financier mis en ligne fait appa­raitre que l’Open Soci­ety Foun­da­tions fait par­tie de ses prin­ci­paux financeurs.

L’objectif revendiqué de l’association est de déploy­er et de faire appli­quer dans la pro­fes­sion des jour­nal­istes un code de con­duite sur l’im­mi­gra­tion  appelé « Car­ta di Roma ». Celui-ci con­tient des « bonnes pra­tiques » pour cou­vrir le fait migra­toire, qui passent notam­ment par l’emploi d’un « lex­ique adap­té » sur l’immigration et les minorités.

Le code de con­duite rédigé par Car­ta di Roma a été signé par le Con­seil nation­al ital­ien des jour­nal­istes (CNOG) et la Fédéra­tion nationale de la presse ital­i­enne (FNSI) en juin 2008. Le site de l’association nous apprend que d’autres pays comme la Grèce et la Bul­gar­ie ont adop­té un mécan­isme sim­i­laire afin de « sig­naler les fautes et les dis­crim­i­na­tions dans les médias ».

L’association se tar­gue que « la Direc­trice Générale des Affaires intérieures de la Com­mis­sion européenne a men­tion­né la Car­ta di Roma comme une bonne pra­tique au niveau de l’UE ».

Par­mi ses activ­ités, Car­ta di Roma organ­ise des réu­nions et des for­ma­tions à l’attention des jour­nal­istes et du grand pub­lic. « La for­ma­tion Car­ta di Roma est oblig­a­toire pour toutes les écoles ital­i­ennes de jour­nal­isme ».

Par­mi les pré­con­i­sa­tions con­tenues dans le code de con­duite, on peut citer :

  • « Adoptez tou­jours des ter­mes juridique­ment appro­priés afin de don­ner au lecteur et à l’u­til­isa­teur une adhé­sion max­i­male à la réal­ité des faits, en évi­tant l’u­til­i­sa­tion de ter­mes inap­pro­priés », le terme « clan­des­tins » est ain­si jugé négatif et serait à prohiber.
  • « Dans la mesure du pos­si­ble, con­sul­ter des experts et des organ­ismes spé­cial­isés en la matière, afin de pou­voir fournir au pub­lic une infor­ma­tion dans un con­texte clair et com­plet, qui abor­de égale­ment les caus­es des phénomènes ». Cette pré­con­i­sa­tion s’accompagne pour­tant par la pub­li­ca­tion sur le site de l’association d’articles résol­u­ment engagés en faveur de l’immigration, fusse-t-elle légale ou clandestine.

Un éditorial qui nie le réel

Un édi­to­r­i­al de mem­bres de l’association en donne une illus­tra­tion explicite :

« L’in­va­sion n’est qu’un état d’e­sprit, on le sait bien, les chiffres nous le dis­ent. Mais si ce mot est répété à l’in­fi­ni, il prend forme et devient vrai, il pro­duit de l’anx­iété, il fait peur. Nous avons appris à con­naître le mécan­isme de la peur, depuis au moins quinze ans elle con­di­tionne nos étés à l’an­nonce d’ un mil­lion prêt à quit­ter la Libye ; elle con­di­tionne les cam­pagnes élec­torales cen­trées sur l’im­mi­gra­tion, même si ce n’est pas le sujet du jour. Comme cela s’est pro­duit dans cette cam­pagne élec­torale, qui a com­mencé sans crier gare mais qui s’est immé­di­ate­ment appro­priée “l’ef­fon­drement” du hotspot de Lampe­dusa, qui souf­frait en réal­ité depuis un cer­tain temps même si les poli­tiques ne s’en étaient pas vrai­ment aperçue ».

Peu importe que depuis 2014, l’Italie ait vu arriv­er sur ses côtes plus de 850 350 clan­des­tins selon le décompte réal­isé par le Haut-com­mis­sari­at aux réfugiés de l’ONU. Cha­cun aura com­pris que selon la doxa poli­tique­ment cor­recte, il ne s’agit nulle­ment d’une « inva­sion » mais d’une « crise de l’accueil », les capac­ités d’accueil étant par nature tou­jours insuffisantes.

Dans sa stratégie d’influence, Car­ta di Roma ne se con­tente donc pas de pré­con­i­sa­tions anodines, l’association revendique faire des sig­nale­ments à l’ordre des jour­nal­istes. « Des dizaines de let­tres et de com­mu­niqués de presse ont été envoyés aux agences de presse et aux jour­nal­istes et réal­isa­teurs de l’in­for­ma­tion grand pub­lic, (…) plusieurs procé­dures offi­cielles ont été envoyées à l’Or­dre des jour­nal­istes pour les vio­la­tions du code », peut-on lire sur son site.

Tout cela en pub­liant sur son site des arti­cles résol­u­ment en faveur de l’immigration la plus « ouverte » pos­si­ble, comme s’il s’agissait d’un phénomène naturel auquel on ne peut être opposé. Un bel exploit.

Dans la con­ti­nu­ité de l’activité de Car­ta di Roma, il est impor­tant de sig­naler le tra­vail réal­isé en 2014 et soutenu par l’Open Soci­ety Foun­da­tions visant à la rédac­tion d’un glos­saire « média-friend­ly » (ami­cal vis-à-vis des médias) sur la migration.

La plate-forme suisse du vivre ‑ensem­ble (….) présente ain­si le tra­vail réalisé :

« L’Alliance des Civil­i­sa­tions-ONU (UNAOC) et Panos Insti­tute Europe ont demandé à un comité sci­en­tifique com­posé de huit organ­i­sa­tions inter­na­tionales et de la société civile tra­vail­lant dans le domaine de la migra­tion (IDMC, la FICR, l’OIT, l’OIM, le HCDH, PICUM, Tdh et le HCR), de rédi­ger la pre­mière ver­sion du glos­saire. Les déf­i­ni­tions établies par ces organ­i­sa­tions ont ensuite été exam­inées par un comité édi­to­r­i­al de pro­fes­sion­nels des médias, spé­cial­isés dans la migra­tion et tra­vail­lant à The Globe and Mail, à The Guardian, à l’Université de Colum­bia et au Syd­ney Morn­ing Her­ald ».

Open Migration, un site « ressources »

Autre ini­tia­tive financée en Ital­ie par l’Open Soci­ety Foun­da­tions, le site inter­net Open Migra­tion se présente comme appor­tant des infor­ma­tions, de la com­pé­tence et de la con­nais­sance pour informer et faire pren­dre con­science des sujets relat­ifs aux migrants et à la migration.

Si une rubrique inti­t­ulée « Tableaux de bord » con­tient des infor­ma­tions sur l’ampleur de l’immigration en Europe, de nom­breux arti­cles sont résol­u­ment engagés. La seule lec­ture de leur titre est par­lante : « la crim­i­nal­i­sa­tion des étrangers dans les médias », « les dan­gers de la réten­tion admin­is­tra­tive des migrants en Europe », etc.

Faute de mis­es à jour des dif­férentes info­gra­phies, l’internaute aura plus de chances de trou­ver sur le site d’Open Migra­tion des édi­to­ri­aux ou des études uni­ver­si­taires sur la per­cep­tion de l’immigration que des infor­ma­tions chiffrées récentes et sour­cées sur l’immigration.

Les prochains mois nous diront si le nou­veau gou­verne­ment ital­ien dirigé par Geor­gia Mel­oni saura s’affranchir du cadre juridique qui paral­yse toute reprise en main de la poli­tique migra­toire en Ital­ie. Il y a fort à douter que les médias de grand chemin sous influ­ence l’y encouragent.

L’Ojim a réal­isé une brochure numérique sur « George Soros et la société ouverte ». Cette brochure est réservée à nos dona­teurs (vous pou­vez choisir dans une liste la brochure lors du don). Pour tout savoir sur Soros, pour nous aider, vous pou­vez nous soutenir à un moment où l’Ojim est con­vo­qué par la PJ suite à une plainte d’Am­jad Allouchi, jour­nal­iste du Pro­grès de Lyon. Cli­quer ici.

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