À partir du nouveau plan de tirage du 28 janvier, les éditions Ouest-France seront chamboulées dans le Finistère et la Manche, sur les marges de son fief centré sur les deux grandes villes de la Haute-Bretagne, à savoir Nantes et Rennes. Plusieurs éditions seront regroupées, tandis que dans le sud Manche, les éditions d’Avranches et de Granville seront séparées.
Le projet a été annoncé au Comité d’Établissement du 17 octobre 2014. Pour la direction, il est justifié par le fait que “les lecteurs ne se déplacent plus” dans les rédactions locales. Il s’agit, dans le Finistère nord, de regrouper les éditions de Brest et de Morlaix, en fermant la rédaction de Landerneau et en transformant celle de Morlaix en agence avec 1,8 poste affecté. Dans le Finistère sud, les rédactions de Pont l’Abbé et de Châteaulin sont rayées de la carte. La première avait déjà maigri en septembre 2013 suite au non-remplacement de la secrétaire partie en retraite et ne comptait plus que deux journalistes.
Dans la Manche, les éditions de Saint-Lô et de Cherbourg sont regroupées en une seule, la rédaction de Cherbourg devenant une agence avec 1,6 poste affecté. En revanche, celles de Granville et d’Avranches sont clairement séparées. Les réductions de poste et fermetures seront bouclées en septembre 2015.
La réunion DP du 18 novembre et le CE du 13 apportent des précisions intéressantes. Ce sont en effet six éditions qui seront touchées par le plan : Nord Finistère (nouvelle), Saint-Lô-Coutances-Cherbourg (nouvelle), Quimper (nouvelle), Centre-Finistère, Avranches et Granville. La nouvelle édition Nord-Finistère devrait par ailleurs faire 14–15 pages contre 17 pour les deux existantes, et celle de Saint-Lô-Cherbourg 10–12 pages contre 14 pour les deux existantes actuellement. Ouest-France espère ainsi dégager 500 000 euros d’économie dans le Finistère et 150 000 euros dans la Manche. Dans ce dernier département la direction d’Ouest-France envisage par ailleurs à moyen terme de mutualiser le réseau de correspondants avec La Presse de la Manche, filiale d’Ouest-France depuis 1990 et diffusé tous les jours à 23 864 exemplaires en moyenne, essentiellement dans le Cotentin.
Par ailleurs, les réductions de poste se poursuivent tous azimuts. Ainsi, un poste devrait être économisé dans la rédaction en mutualisant les équipes des services coordination et mise en scène. La nouvelle version V3+ du logiciel de mise en page maison, développé à partir d’Indesign a permis de “supprimer des postes de spécialistes de la mise en page”, selon la CGT. Et les restructurations concernent aussi certaines filiales. Ainsi, au sein du Courrier de l’Ouest, quotidien diffusé à 96 000 exemplaires en moyenne en Anjou et dans les Deux-Sèvres, et filiale du groupe depuis 2008, neuf postes seront supprimés d’ici 2018 (4 en Maine-et-Loire et 5 dans les Deux-Sèvres dont 4 pour la rédaction de Niort), au grand dam de la section SNJ du journal. Le syndicat pointe l’absence de justification économique : le quotidien a dégagé un résultat net d’exploitation de 2 millions d’euros en 2013.
@SNJ_national #PQR #Presse #medias #FF #Angers #Rennes La direction croit-elle en l’avenir du Courrier de l’Ouest ? pic.twitter.com/gHS0sHGBmO
— SNJCO (@SNJCO) 18 Novembre 2014
Chez les imprimeurs, les effectifs diminuent aussi. Une restructuration feutrée qui inquiète les syndicats. Le quotidien breton a lancé une modernisation de ses rotatives en lançant une nouvelle rotative KBA début novembre dans son usine de Chantepie (280 salariés). Le groupe a une autre imprimerie à La Chevrolière (44) qui emploie 72 salariés et possède une rotative Wifag mise en route en 2010.
Avant l’achat de la rotative KBA, il y avait à Chantepie 35 imprimeurs sur cinq rotatives Nohab. Une fois la KBA montée à son rythme de croisière, le 17 novembre, une des rotatives Nohab a été arrêtée. Il n’y avait dès lors plus que 29 imprimeurs. Le 28 janvier, une autre Nohab sera arrêtée et il n’y aura plus que 26 imprimeurs sur 4 rotatives, de source syndicale.
Une évolution qui inquiète la CGT, très présente au sein des ouvriers du Livre, notamment parce que la baisse du nombre de rotatives limite les possibilités de secours entre elles en cas de panne. Par ailleurs, le nouveau plan de tirage suscite aussi des inquiétudes parmi les imprimeurs, qui pointent un risque d’une nouvelle baisse de diffusion. La direction veut en effet démarrer l’impression plus tôt, à 22 h 15 au lieu de 22 h 30. Un quart d’heure crucial : “une partie des informations sportives ne seront pas dans les colonnes”, explique le syndicat.
En parallèle avec les suppressions de postes, le groupe procède aussi à des innovations, notamment pour pallier la fermeture de petites rédactions locales. Ainsi, au sein du groupe commence à se développer le métier de reporter d’édition.
Mi-novembre, ils étaient déjà 18 en Loire-Atlantique, en Ille-et-Vilaine, dans le Morbihan, le Calvados et en Sarthe. Quatre autres seront créés en 2015 pour compléter la réorganisation des rédactions finistériennes : un sera basé à Brest et dédié au Nord-Finistère, et trois à Quimper, pour le pays Bigouden, le Centre Finistère et le pays de Fouesnant.
Leur fiche de poste ne sera disponible que début 2015. Toutefois, devant les délégués du personnel, la direction d’Ouest-France a esquissé les grandes lignes de leur métier. Ils seront affectés en-dehors d’un centre-ville sur un secteur géographique étendu et rattachés à une rédaction multiple dont le cadre fera leur plan d’organisation annuel. Ils devront assister aux réunions de rédaction dans la mesure du possible mais ne seront pas astreints à la tournée des rédactions le week-end.
Du côté des personnels et des syndicats, l’évolution suscite toutefois des inquiétudes. La première d’entre elles tient au risque de la généralisation du télétravail, un risque que la direction écarte pourtant à chaque CE où le sujet est abordé. Certains pensent que les reporters d’édition pourraient se généraliser pour à terme supplanter les petites rédactions dont le réseau serait ainsi détricoté. Cependant, pour l’heure, hors des regroupements en Finistère et Manche, aucune fermeture d’édition ni de rédaction n’est à l’ordre du jour.
Crédit photo : laurenmcnees via Flickr (cc)