Comme chaque année, les dirigeants de sept grandes puissances économiques se réunissent lors du sommet appelé « G7 ». Cette réunion destinée à aboutir à la définition d’objectifs communs a lieu du 26 au 28 mai à Taormina, en Sicile.
On aurait pu s’attendre à ce que le sujet des arrivées croissantes de clandestins en Europe via le pont maritime entre la Libye et l’Europe et celui des moyens à mettre en œuvre pour les endiguer soient traités tant par les dirigeants que par les journalistes.
Oublierait-on que les migrants, demandeurs d’asile ou réfugiés économiques, affluent dans un continent où certains pays connaissent un chômage de masse et des finances publiques exsangues ?
À l’occasion de ce G7, la crise migratoire est paradoxalement réduite pour certains médias à une seule question : comment maintenir de façon sécurisée le flot ininterrompu de clandestins transitant par la méditerranée ?
Le quotidien suisse Le Temps a été parmi les premiers à annoncer le 26 mai que durant la réunion du G7 en Sicile, « les débarquements de migrants ont été interdits sur l’île pendant le sommet, jusqu’à dimanche ». Cette efficacité soudaine est loin de réjouir de nombreux organes de presse.
Le Monde s’indigne le 27 mai de cette mesure : « les migrants font les frais du sommet du G7 ». « Les débarquements de réfugiés en Sicile ont été interrompus pendant toute la semaine (…) alors même que les navires d’ONG opérant dans le canal de Sicile sont confrontés depuis plusieurs semaines à une augmentation spectaculaire du nombre des opérations au large de la Libye (plus de 50 000 personnes secourues depuis le début de l’année) ». L’urgence semble donc être de maintenir en permanence un pont maritime sécurisé entre les côtes libyennes et l’Italie et non de défendre les frontières avec efficacité comme pendant le G7.
France Info interroge le porte-parole de SOS Méditerranée : « Mardi 23 mai, l’Aquarius était en Méditerranée et a secouru onze embarcations en difficulté. »
France Culture dans le journal de 8 heures du 27 mai ne relaie sur le sujet du G7 et des migrants que la position de SOS Méditerranée et de l’UNICEF.
Pont de l’ascension oblige, certains journaux ne se donnent même plus la peine de modifier les dépêches de l’AFP : Le Parisien et Libération consacrent le même article aux « voix inaudibles de la résistance » lors de la réunion des chefs d’Etat. La parole est donnée à Gianfranco Crua, président de «Carovane Migranti» : «Là-bas, ils ont construit des murs mais ça n’a servi à rien puisque le nombre de migrants n’a fait qu’augmenter depuis». Protégez-vous, ce sera pire. La messe est dite.
Le Huffington Post fait état de l’inquiétude de nombreuses associations, le sujet des migrants risquant de n’être « même pas abordé par les dirigeants ». Le site publie également une vidéo postée par Cécile Duflot (EELV) : « La séquence (de la vidéo) montre le travail acharné des sauveteurs pour venir en aide aux réfugiés. » « Une lutte terrible, la détresse humaine et la réalité d’une situation trop souvent balayée d’un revers de main ».
Pas un article n’aura fait état de la controverse sur le rôle des ONG en méditerranée, des côtes italiennes déjà submergées de migrants, des nombreuses ouvertures de camps d’accueil, à peine ouverts et déjà saturés comme Porte de la Chapelle ou à Grande Synthe.
Un nouvel exemple de pluralisme de l’information et de croisement des sources.