Le groupe d’Arnaud Lagardère présente une santé contrastée. Les pertes abyssales de l’activité autour du sport sont compensées par les succès de Hachette, de la distribution presse (Relay) et surtout du retail (boutiques aéroports et gares). Un fonds activiste s’affaire autour des comptes (partiellement opaques) du groupe, le bon moment pour faire rentrer Nicolas Sarkozy au conseil de surveillance ?
Qatar, vous avez dit Qatar ?
Les qataris via une holding d’État sont les premiers actionnaires du groupe avec autour de 13% des actions. Ils sont talonnés par le fonds activiste Amber Capital qui petit à petit monte dans le capital et dépasse maintenant les 10%. Derrière, le troisième actionnaire c’est Arnaud Lagardère lui-même avec seulement 7.33% des actions. Mais dans une société en commandite ces 7.33% lui permettent de conserver la direction de la société… en étant responsable sur son patrimoine, un collatéral obligé. Nul n’ignore les excellentes relations de Nicolas Sarkozy avec le Qatar et sa famille régnante, premier actionnaire du groupe.
Une situation d’équilibre instable pour Arnaud Lagardère
Même si les chiffres sont plutôt opaques l’endettement personnel de Monsieur Lagardère serait plus ou moins équivalent à la valorisation des parts de son groupe qu’il détient, autour de 170M€ des deux côtés. Si le Crédit Agricole (le prêteur) demandait le remboursement de son emprunt, Arnaud Lagardère serait contraint de céder ses parts et son poste pour honorer ses engagements. Il détient ses parts dans une holding (LCM) qui ne donne des informations sur ses comptes qu’avec une admirable retenue, une discrétion que certains jugent inquiétante.
Conseil de surveillance : faire venir des alliés
Amber Capital critique la gestion (disons hasardeuse) d’Arnaud Lagardère et souhaiterait que le groupe se retire des médias (Paris-Match, le JDD, Europe1) pour se recentrer sur l’édition, les Relay et le retail. Avec 10% du capital, Amber n’a toujours pas de représentants au conseil d’administration, les Qataris parfois hésitants s’étant toujours ralliés à Arnaud Lagardère en votant contre les Américains. C’est là que l’arrivée de Nicolas Sarkozy est une riche prise. Son arrivée au conseil de surveillance est accompagnée de celle de Guillaume Pepy ex Président de la SNCF qui pourrait diriger dans un second temps la branche travel retail.
Fin 2019 c’est un ancien du Crédit Agricole, Monsieur Patrick Valroff, qui a été nommé président d’un conseil de surveillance qui se voit considérablement modifié. Mais cette nomination peut aussi être vue comme une incursion de la banque, inquiète des errements (sportifs et autres) du groupe. Dans un conseil de surveillance, comme le nom l’indique, on surveille…
Et inquiétude des journalistes
Les sociétés de journalistes (SDJ) et de rédacteurs (SDR) du pôle média du groupe, Paris-Match, Journal du dimanche et Europe 1 se font des cheveux pour leur crédibilité devant ces arrivées au conseil de surveillance, surtout celle de Nicolas Sarkozy. Dans un communiqué commun :
« Dans un contexte de défiance généralisée vis-à-vis des médias et de suspicion de leur proximité avec les responsables politiques, nous nous inquiétons du risque que cette nomination fait peser sur notre crédibilité…Les SDR et SDJ des trois rédactions réunies réaffirment dès aujourd’hui avec force leur attachement à l’indépendance éditoriale et leur vigilance quant au traitement de l’information en dehors de toute pression. »
NB : Le porte-parole du groupe Lagardère, Monsieur Ramzy Khiroun a porté plainte contre le directeur de la publication de l’Ojim pour « injures publiques ». Ce différend n’influence en rien la rédaction des articles que nous consacrons au groupe Lagardère et à ses médias.