Première diffusion le 24 avril 2022
Un candidat à l’élection présidentielle se doit d’avoir un bon service d’ordre. Un déplacement perturbé c’est un déplacement raté. Ce mois d’avril 2022 a montré, pour les candidats Macron et Le Pen, l’importance de rôder la mécanique en la matière. Il a également révélé de la part des médias dominants un deux poids deux mesures devenu habituel.
Deux évacuations identiques
C’est d’abord Marine Le Pen qui a été la cible d’une militante écologiste le 13 avril. En pleine conférence de presse sur les relations internationales, la candidate a été interrompue par une jeune femme brandissant une pancarte en forme de cœur avec, à l’intérieur, une photo de Marine Le Pen et Vladimir Poutine. L’objectif ? Montrer les liens entre la Russie et le RN. La militante a été évacuée par le service d’ordre de la candidate en étant traînée sur le sol. Le lendemain, c’est Emmanuel Macron, en déplacement à Strasbourg, qui a vu son périple perturbé par des gilets jaunes et des blacks blocks, dont un a été évacué en étant lui aussi traîné sur le sol. Deux évacuations identiques, qui pourtant donnent deux récits différents dans les colonnes du Parisien.
Deux récits différents, manifestante et militant
Du côté de Marine Le Pen, le service d’ordre a « expulsé violemment » une « manifestante »[1]. L’expulsion s’est faite « manu militari » laissant « peu de place à la contradiction ». L’article nous apprend que la jeune femme fait partie du collectif Ibiza qui se revendique « apartisan » (sic). Néanmoins, Le Parisien omet de préciser qu’elle est également conseillère municipale de Boulogne-Billancourt et militante écologiste. Prenons maintenant le même journal, sur un incident comparable, et regardons cela comme une leçon de déontologie journalistique. Il est clairement évoqué un « militant » qui aurait subi une « évacuation musclée »[2]. L’évacuation se justifie, selon l’entourage du candidat Macron, car « la personne n’était pas dans une volonté d’apaisement ».
Notons le choix des mots. D’un côté une « manifestante », qui donc use d’un droit légal et est victime d’une « expulsion violente ». De l’autre un « militant », quelqu’un de politisé, qui vient sciemment s’exposer à des poursuites, cible d’une « évacuation musclée ». Le choix des mots suggère une minimisation de l’évacuation côté Macron, alors que dans les deux cas il s’agit d’une manœuvre banale, que n’importe quel service d’ordre aurait menée à bien avec plus ou moins de pression physique.
Relais télévisuel
Néanmoins, interrompre Marine Le Pen c’est « lutter contre le fascisme » (sic) et s’offrir à bon compte la sympathie des médias en place. Notre héroïne de l’antifascisme a donc pu se payer un passage dans Touche pas à mon poste quelques jours après son action. Sans surprise, elle se place dans la position de la victime, alors que son traitement aurait été identique partout ailleurs. Puis, entre deux appels à aller voter écologiste aux législatives, elle nous dit que « Marine Le Pen veut supprimer l’IVG ». Une information qu’un simple tour sur le site de la campagne de la candidate permet d’éventer, mais qui dans ce cas ne trouve que le silence des chroniqueurs. Le hasard étant parfois ironique, c’est Gilles Verdez, visiblement pris d’un moment de lucidité, qui évoque l’évacuation musclée de Strasbourg, permettant de mettre un instant le doigt sur un deux poids deux mesures qui ne surprend personne.
Le coup de pied de l’âne
Jamais avare en réactions, Christophe Castaner a réagi à l’expulsion de la militante écologiste en déclarant : « La vérité qui dérange, on la sort de la salle ». Une phrase qu’on pourrait presque appliquer au traitement médiatique des affaires McKinsey et Rothschild.