Lorsqu’un établissement privé, a fortiori catholique, se trouve au cœur d’un scandale, tous les autres en pâtissent. L’affaire Notre-Dame de Bétharram en est un bon exemple. En revanche, quand un militant LFI est accusé de pédocriminalité et de torture, on est prié d’éviter tout amalgame.
Bétharram, l’occasion de viser l’enseignement catholique
Notre-Dame de Bétharram est visée par deux cents plaintes pour violences physiques, psychiques, agressions sexuelles et viols. France info recevait lundi 14 avril Violette Spillebout, député Ensemble, et Paul Vannier, député LFI, tous deux co-rapporteurs de la commission d’enquête parlementaire sur le contrôle des établissements scolaires par l’Etat et la prévention des violences. Violette Spillebout affirmait que « tous les dispositifs de contrôle de l’État ont été “défaillants pendant des années” dans les établissements privés. » Paul Vannier expliquait que « on peut sentir une forme d’omerta, de tabou dans l’administration, dans l’Éducation nationale relative à la question des établissements privés, et privés sous contrat en particulier. »
Les enquêtes pour violences peuvent également devenir prétexte à des contrôles qui ciblent le fonctionnement de l’établissement. Ainsi, l’enquête administrative visant Notre-Dame de Bétharram, aujourd’hui le Beau Rameau, pointe des temps de célébration obligatoire pendant l’Avent. Selon le recteur, cela contrevient au principe de liberté de conscience. Le Beau Rameau est pourtant un établissement catholique, c’est aussi clair dans ses statuts que dans son nom.
Bétharram, l’arme de la gauche contre François Bayrou
L’affaire Bétharram n’est pas uniquement l’occasion de s’attaquer aux établissements catholiques. Elle est aussi l’occasion d’affaiblir François Bayrou. Entre 1980 et 1990, certains de ses six enfants y ont été scolarisés, et son épouse y a enseigné le catéchisme dans les années 90, à l’époque où François Bayrou était ministre de l’Éducation. Sans oublier les liens qu’un homme politique entretient avec un important établissement scolaire local. Les plaintes pour violences sexuelles commencent en 1996. François Bayrou est particulièrement accusé d’avoir couvert le père Carricart, accusé de viol en 1998. François Bayrou affirme cependant ne pas le connaître : « Ma femme connaissait le père Carricart, mais je ne connais pas tous ceux que ma femme connaît. », explique-t-il. La formule est « pour le moins confuse » pour Libération.
Tu peux accuser un militant LFI, mais pas tout LFI
Aucune communauté n’est jamais particulièrement pressée de reconnaître des violences sexuelles en son sein, qu’elle soit religieuse… ou politique. En octobre 2024, un scandale sordide a éclaté : un assistant familial se trouvait au cœur d’un réseau pédocriminel, réseau qu’il « fournissait », avec les enfants placés sous ses soins. Cet assistant familial, Pierre-Alain Cottineau, était également militant la France insoumise, selon les médias, il a fallu attendre plus ou moins longtemps pour le savoir. France 3 régions le présente dans son titre comme « un assistant familial », dans son introduction comme un « père de famille âgé de 32 ans », et il faut attendre la dernière partie pour apprendre qu’il était également « Candidat aux élections départementales (en 2021, NDLR) pour la France Insoumise. » Il était également engagé dans l’Esac, l’assocation LGBTQIA+ du pays d’Ancenis. Ce dernier point est rarement cité par les médias. Peut-être parce que La France Insoumise est suffisamment bien installée pour se remettre d’un scandale pédocriminel, aussi abominable soit-il, alors que l’Esac, de son propre aveu, a bien cru qu’elle « ne s’en remettrait pas et allait disparaître ». Cette association a été créée par Pierre-Alain Cottineau. Inutile de dire en revanche à quelle vitesse les différents médias précisent que Bétharram est un établissement privé catholique, et non un établissement scolaire.
Un pédocriminel à gauche ? Vous êtes sûrs ?
Si les médias ne s’appesantissent pas sur l’engagement de Pierre-Alain Cottineau à La France Insoumise, c’est peut-être parce qu’ils ont du mal à y croire. La Dépêche évoque ainsi le « profil déconcertant » d’un homme « bien sur tous rapports en apparence (sic.) » On remarque que cette description n’accompagne jamais les prêtres pédocriminels, comme s’il était plus facile d’imaginer un prêtre commettant des sévices plutôt qu’un militant LFI agissant de même.
La France Insoumise a exclu Pierre-Alain Cottineau le 2 octobre 2024, soit le lendemain de la révélation par Ouest-France de son affiliation avec le parti. L’enquête avait commencé le 11 septembre, et le 30, Actu44, site de presse dédié à la Loire-Atlantique, abordait l’affaire avec un certain nombre de détails, excepté le nom du suspect. A ce moment, on sait qu’un « suspect de 32 ans » a été arrêté pour « viols et tortures sur une enfant de quatre ans et demi handicapée », que cet homme est « domicilié entre Nantes et Ancenis », qu’il « exerçait la profession d’assistant familial », qu’il « s’était vu confier cette enfant depuis le 10 décembre 2023 », qu’il est « lui-même est père d’un enfant de quatre ans dont il avait la garde alternée », qu’il a un « agrément d’assistant familial » depuis le 1er décembre 2023, qu’il « accueillait la fillette à son domicile, en région d’Ancenis, depuis le 7 décembre 2023. » On apprend également que ce suspect a été arrêté « à sa descente d’avion en provenance de Tunisie où il était parti en congé. » On ne peut que regretter que personne, chez LFI, n’ait lu cet article et n’ait fait le lien avec Pierre-Alain Cottineau. Cela aurait permis au parti d’enquêter et peut-être de l’exclure avant les révélations de Ouest-France. Au moins auraient-ils pu montrer que leur enquête avait commencé avant ces derniers. LFI refusera en revanche qu’on l’amalgame à cette affaire, exercice quasi obligé lorsqu’il s’agit d’enseignement privé catholique.
Adélaïde Hecquet