So Press n’arrête pas de lancer des magazines, comme So foot, Society, So film, So Lonely, Pédale !… Le dernier en date ? So Good. Comme ses petits camarades, So Good se singularise… ou plutôt justement ne se singularise pas par sa trame de fond : un magazine dans l’air qui temps, traitant de l’air du temps, sur tous les sujets, bêtement et même avec des bêlements (de mouton suiviste). Un coup d’œil respectueux de la nécessaire (dans ce cas précis) distanciation sociale.
So Press vu par l’OJIM, c’est par ici.
Comme ses camarades du même bord bobo libéral libertaire, type Libération, urbain des métropoles, électeur de Macron en 2017 puis des verts ou d’Hidalgo lors des récentes élections municipales, heureux de voir nommer un adjoint à l’agriculture à Paris, sans doute, So Good ne fait pas dans le détail (à moins qu’il fasse au contraire dans ses propres points de détails idéologiques) et marche résolument dans le sens du vent. La couverture du premier numéro de ce nouveau trimestriel (juin/juillet/août 2020) a tout, consciemment ou inconsciemment, d’une affiche de type soviétique. Consciemment, probablement.
Fond rouge clair, personnalités statufiées à la soviétique, une femme politique finlandaise de 34 ans, un « ado américain qui intervient à l’ONU et attaque l’État américain pour protéger la planète » et un noir « geek français qui se sert de la tech pour prévenir les prochaine crises ». Deux membres des minorités visibles (au moins). Des personnalités libérales libertaires en diable, cette conception du monde qui a conduit là où nous en sommes, néanmoins présentées comme des activistes de l’opposition à ce même monde. Inconsciente ou pas, en effet, cette couverture a tout de l’ancienne Pravda, « la vérité », le quotidien officiel du parti communiste de l’URSS, celui qui disait « la vérité » qu’il convenait de croire en masquant le réel derrière une réalité inventée. Aujourd’hui, c’est So Good au pays des soviets.
D’ailleurs, une page complète l’affirme (page 63) : So good, c’est « plus qu’un magazine, un mouvement ».
Les accroches de couverture : « hacker, activiste climatique, femme politique, la génération solution ». Une seconde de frayeur chez le lecteur qui crût furtivement qu’il était écrit « solution finale ». Il n’y a pas les mots mais l’idée est dans toutes les pages, une sorte de « ce sera nous et les autres disparaîtront car ils ont tort ».
116 pages, sans publicité, co-édité avec la plateforme de financement participatif Ulule, So Good veut se consacrer « aux initiatives citoyennes », lesquelles seraient par nature de gauche et social libérale (au-delà, c’est le Mordor). Il s’agirait donc de combattre « pour un monde meilleur » comme à la bonne et belle époque du camarade Staline.
Le fond ?
On le touche en effet, le fond. Après, une double page de « MERCI » aux abonnés, le sommaire est édifiant. Le lecteur croisera donc :
- L’ado qui veut faire plier l’État américain ? Un Amérindien évidemment, sans quoi ce n’est pas assez légitime, qui lutte entre deux concerts de hip hop. Son nom ? Xiuhtezctl Martinez.
- Nadia Murad, prix Nobel de la paix, l’« esclave sexuelle à 19 ans » de l’État islamique (là, on ne comprend plus, c’est bien l’idéologie que l’Europe laisse tranquillement se développer sur son territoire, l’islamisme radical ?), qui le dit : « parfois il suffit d’une femme qui parle », presque du Adèle Haenel dans le texte.
- « En Finlande, la première (sic) ministre Sanna Marin est à peine trentenaire et a déjà 85 % d’opinions favorables. Comment fait-elle ? ». Où l’on comprend que les opinions favorables et l’âge seraient liés ? Étonnant, non ? En tout cas, « La Finlande est le pays le plus heureux du monde » et c’est normal, c’est une femme qui le dirige non mais. Notons que « au gouvernement comme sur Instagram elle innove et réforme pour plus d’égalité et de solidarité ». Il est vrai qu’une premier ministre qui réforme… sur Instagram, cela décoiffe. De quoi changer la vie. On rêverait presque d’un Sibeth Ndiaye présidente en France, pour être meilleurs que les Finlandais.es.
- Le hacker noir est glorifié à partir de la page 82.
- En Inde ? « Les femmes qui ont ravivé la rivière pour ramener la vie ». Ouf !
- À Dakar ? « Les jeunes surfent pour rêver ». Re-Ouf !
- Un reportage sur « La Croix Rouge détective » qui œuvre à « rétablir les liens familiaux » entre personnes séparées par des catastrophes (si l’on en croit les dessins, cela concerne seulement l’Afrique).
- Une petite larme aussi pour les koalas d’Australie, heureusement sauvés par des chiens.
Ce sont les principaux reportages. Femmes, animaux, gens de la diversité.
Il y a aussi une foultitude de petites rubriques, des brèves, un peu chaotiques comme savent le faire les magazines destinés non pas à être lus (le fond de l’encre est faible) mais feuilletés d’un œil distrait, néanmoins heureux de se sentir chez soi dans ces pages.
Ainsi :
- « Make your style great again » (vous aurez remarqué la fine référence à Trump ?), c’est au sujet de votre look. Sans mauvais esprit, une page que le directeur de l’OJIM devrait lire.
- « Good test », « 5 questions optimistes » car il faut se la jouer feel good, c’est même l’objet de toute une « littérature » aujourd’hui et de ce So Good.
- « Les change makers de So Good. Make good things happen » (pour mémoire, c’est un trimestriel français). Ce sont quelques pages destinées à vous convaincre d’aller remplir des cagnottes sur Ulule. Par exemple, le projet « nique pas ta mer », destiné à transformer les bouteilles plastiques en baskets ou « Les P’tits doudous », forcément, on est entre bobos.
- Bien sûr, le contraire était impossible : une page, la 71, vous invite à aller cagnotter pour le « Projet SOS Méditerranée » sur Ulule pour « agir pour sauver des vies ». Sur ce dernier point, les avis seront évidemment partagés et qui pense que l’association en question participe du trafic d’êtres humains, ainsi que de leur mort, ne devra pas se sentir obligé de donner de l’argent. Il pourra s’orienter plutôt vers 1083, le jean 100 % français. Avec So Good, tout est égal : la vie des gens et les jeans.
- Page 90, on vous oriente vers la coopérative agricole la plus proche de chez vous parce que « demain c’est maintenant ». C’est de l’agriculture, c’est du bio mais ce n’est, à en croire la carte proposée par le magazine, qu’en ville… Pourtant… pourtant, la rumeur affirme que dans le monde rural…
Finalement, So Good est un vrai bon moyen, vraiment, de comprendre son prochain électeur de Macron, de la gauche et/ou des verts. Vu de l’extérieur, il est facile de se tromper et de croire qu’il est cultivé, fin, intelligent et qu’il vote selon son esprit critique. Il n’en est rien : il vote en suivant la doctrine officielle, dont So good est maintenant l’un des supports agrées.