Jusqu’au 9 juin prochain au centre Centre Pompidou de Metz, une exposition rend hommage aux « paparazzi-photographes, stars et artistes ».
Une exposition qui s’est attiré les foudres d’un certain Jean-Michel Aphatie, défenseur acharné des « valeurs » du journalisme devant l’Éternel. « C’est une insulte aux valeurs que nous avons en commun. Le travail mis à l’honneur par ce musée national, c’est un travail de voleurs de photos que pratiquent des gens qui espionnent, qui fliquent et traquent des personnalités connues, qui arrosent d’argent des indicateurs sans morale, qui corrompent des gens faibles, qui mentent et truquent dès que ça sert leur petit commerce. » Si certaines de ces étiquettes pourraient s’appliquer aux journalistes mainstream en général, c’est bien aux seuls paparazzis qu’Aphatie s’en prend.
« Que la honte soit sur les organisateurs », a‑t-il lâché, soulignant par ailleurs le « machisme d’une telle exposition » qui consacre un carré réservé aux femmes traquées par les paparazzis. « Lady Diana est dans cette exposition et elle est MORTE de cette traque des paparazzis ! Et il y a un carré spécial pour nous présenter cela ! Des femmes traquées comme des bêtes, eh ben il y a un enclos pour elles. C’est scandaleux ! », s’emporte le journaliste dans sa chronique RTL.
Et celui-ci de conclure par une réflexion sur le journalisme qu’il défend : « Il faudra bien un jour que l’on s’interroge sur le journalisme français et sur les valeurs qui sont les siennes. Au nom de la recherche de la vérité et du souci d’informer, nous pouvons voler des photos, nous cachons des caméras, nous enregistrons des gens à leur insu et nous accusons sans preuve. Aucun corps de métier en France ne travaille comme ça. Des serruriers aux bouchers, vous pouvez tous les passer. Il n’y en a pas un qui fait ça ! »
Une analyse que ne partage pas du tout son confrère de L’Express, Renaud Revel, qui, sur son blog, prend la défense d’une profession jugée incomprise. Le journaliste rappelle tout d’abord qu’il est « comme dans bien d’autres métiers, de médiocres et de merveilleux photographes ». Des photographes qui « livrent parfois des instantanées qui en disent bien plus que tous les reportages de la terre ».
Revel considère que, dans sa charge contre ce métier, Aphatie a « tort » et qu’« il s’agit là, qu’on le veuille ou non, d’un travail journalistique : brutal et intrusif, mais indispensable ». Et ce dernier de prendre l’exemple de Paris Match : « Ses plus belles pages, Match les doit à cette profession, à l’époque où cet hebdomadaire était au pinacle, quand Daniel Filipacchi et Roger Thérond en étaient les formidables patrons. Sans ces voleurs d’images, ce magazine magique n’aurait jamais connu cette renommée, ni ce destin. Gardons raison donc et évitons les discours définitifs. »
Dans le même genre, Renaud Revel revient sur l’affaire Hollande-Gayet partie, on le rappelle, d’une photo de paparazzi. « Que je sache, elles n’ont pas été balayées d’un revers de la main par les médias, si je m’en réfère aux exégèses à n’en plus finir qu’elles ont suscité », fait-il remarquer, ajoutant que « même Jean-Michel Aphatie y participa pleinement, en y apportant sa part de réflexion et de questionnement. Cohérence oblige : au nom de sa charge contre cette profession honnie, il aurait été plus logique qu’il se refuse à rentrer même dans ce débat. »
Autre point de vue, autre réflexion sur le monde journalistique. Concluant son papier, Revel interpelle : « Que l’on ne vienne pas s’étonner si les français ont une si piètre opinion d’une profession qui vit en vase clos, s’entreglose et s’auto-congratule, dans des réflexes de corps insupportables. Où le tutoiement avec les politiques va de soi. Où les liens dépassent souvent les simples relations de connivence. Où la transparence est un leurre. C’est cela dont crève ce métier, Jean-Michel ! Mais pas de quelques photos de paparazzis, dont il faut défendre l’existence. »
Voir notre portrait de Jean-Michel Aphatie, la politique sinon rien
Crédit photo : capture d’écran vidéo Le Républicain Lorrain via Youtube