Le 24 avril, l’animateur de télévision conservateur Tucker Carlson et la chaîne Fox News ont décidé de mettre un terme à leur collaboration. Beaucoup d’encre coule depuis concernant les raisons et les conséquences de cette rupture, annoncée comme une séparation par consentement mutuel mais qui ressemble bien plus à un licenciement.
La star des milieux conservateurs
Tucker Carlson est une personnalité conservatrice mondialement connue. Aux États-Unis, il est incontournable dans le paysage médiatique et politique, mais son visage est aussi familier en Europe, surtout depuis qu’il s’est ouvertement opposé à la « narration sanitaire » officielle et qu’il a exprimé de sérieux doutes sur le soutien apporté par Washington à Kiev, ou encore en raison de ses sorties de route concernant la version autorisée sur l’assaut du Capitole du 6 janvier 2021.
🚨🚨 Tucker-Carlson “in fact, it’s looking likely that the #Covid #Vaccine is suppressing the immune system” 😳 pic.twitter.com/YYxPZPlRnD
— Kevin — WE THE PEOPLE❤️ — DAD🦁 🐉 🔥 (@bambkb) April 16, 2023
Figure centrale de Fox News, il y animait depuis 2016 Tucker Carlson Tonight, l’émission la plus regardée aux États-Unis, en moyenne par 3,5 millions de téléspectateurs, dont certains extraits faisaient régulièrement le buzz sur les réseaux sociaux.
In January, Tucker Carlson reacted to a video of Zelensky thanking BlackRock, J.P. Morgan and Goldman Sachs for “rebuilding” Ukraine.
Tucker Carlson has consistently covered the corruption in Ukraine. He has also said that BlackRock is pushing ESG.
Well, in February of this… pic.twitter.com/6DxpF9WJcP
— Liam McCollum (@MLiamMcCollum) April 25, 2023
Rangé dans la catégorie des haineux et des complotistes par tous les clercs de la pensée dominante, Carlson disposait jusqu’au vendredi 21 avril, date de sa dernière émission, d’une audience et d’une surface médiatique considérables pour quelqu’un tenant régulièrement des propos sortant des clous de la bien-pensance. Son départ fait l’effet d’une bombe et des dizaines de millions d’Américains n’en pouvant plus de la terreur des médias mainstream se retrouvent ainsi orphelins.
It was an honor to be featured in one of Tucker Carlson’s final broadcasts.
Thank you @TuckerCarlson for setting the gold standard in journalism with your unwavering integrity. The people of Hungary are behind you & wishing you all the best in your future endeavors! pic.twitter.com/pkJCvy9o8T
— Balázs Orbán (@BalazsOrban_HU) April 24, 2023
Remous en bourse
L’annonce du départ de l’icône Carlson a provoqué une chute de cinq points de Fox Corporation en bourse, alors qu’elle intervient suite à l’accord financier entre Fox et Dominion, cette fameuse entreprise spécialisée dans le matériel et et logiciels de vote électronique.
Certains voient d’ailleurs dans cet accord à l’amiable la raison principale du départ de Carlson. Ce dernier y est en effet pour beaucoup dans le différend entre Fox et Dominion : dans un reportage de mars 2023 sur l’affaire du Capitole, Carlson a remis sur la table la question de la transparence du vote électronique aux élections de 2020. Finalement, le procès pour diffamation n’aura pas lieu et la chaîne a accepté de verser la bagatelle de 787 millions de dollars à Dominion, quelques jours avant le départ de Carlson.
Rupert Murdoch a‑t-il viré Carlson ?
L’affaire Dominion a sans doute joué dans le limogeage de Carlson, mais le Los Angeles Times avance d’autres raisons et évoque le rôle direct joué par le magnat de la presse Rupert Murdoch, président de Fox News.
Le quotidien californien affirme qu’il s’agit bien d’une décision unilatérale de la direction de la chaîne, Murdoch ayant réuni ses fidèles du comité directeur, et notamment son fils, pour décider du cas Carlson. C’est pourtant lui qui l’avait hissé au rang de star en 2017 à la place de Billy O’Reilly. L’accord commun trouvé entre Carlson et Fox n’en serait donc pas un, il s’agirait bien d’un licenciement décidé par le clan Murdoch, qui ne voulait plus assumer la charge représentée par le trublion Carlson.
@jgalt485 Bouip Boop, travail terminé ! 🤖 pic.twitter.com/t9RYeS8NBh
— Scribot 🤖 (@scribot_ai) April 24, 2023
Abby Grossberg en embuscade ?
D’autres sources avancent aussi l’affaire opposant Carlson à l’ancienne productrice de Fox News, Abby Grossberg. Carlson et Grossberg sont en effet en procès, la productrice ayant attaqué l’animateur pour discrimination, affirmant qu’elle avait fait l’objet de commentaires antisémites.
Limogée de la chaîne il y a un mois, elle aurait trouvé sa vengeance en poussant au licenciement de Carlson. C’est en tout cas ce que ses avocats affirment à demi-mot, expliquant que le procès opposant leur cliente à l’animateur est un facteur clé pour comprendre la décision de la chaîne sur Carlson.
Selon Tanvir Rahman, un des avocats de Grossberg, « le départ de Tucker Carlson de Fox News est, en partie, un aveu du mensonge systémique, de l’intimidation et de la conspiration dont […] l’ancienne productrice Abby Grossberg, fait état. »
Et si c’était encore plus simple ?
Il est évident que ces raisons internes ne suffisent pas à expliquer le licenciement de Carlson. En réalité, il se pourrait bien que la star du paysage audio-visuel américain soit allée trop loin. Carlson ne se contente pas de taper sur le wokisme ou d’interroger l’opportunité des interventions US à l’étranger, et ainsi de mettre aussi en cause ceux qui lui sont plutôt favorables, les dirigeants politiques républicains, il fait également preuve d’indiscipline quant à la question qui fâche le plus : l’agenda bio-sécuritaire, que Donald Trump a aussi contribué à mettre en œuvre.
Ces derniers mois, Carlson a en effet multiplié les émissions donnant des boutons à la caste qui s’accroche à sa narration sanitaire et guerrière. Il sort ainsi nettement du clivage conservateurs/progressistes pour aller sur un terrain bien plus glissant, celui régenté par le Big Pharma et la Big Tech. Quelques jours avant son limogeage, il a d’ailleurs donné volontiers la parole à Robert F. Kennedy Jr., candidat à l’investiture démocrate et leader de la colère anti-Covid aux États-Unis.
.@RobertKennedyJr joined us to announce his 2024 presidential campaign. pic.twitter.com/1k45Wu19vQ
— Tucker Carlson (@TuckerCarlson) April 20, 2023
C’est sans doute la ligne que Carlson n’aurait pas dû franchir. Avec un Ron DeSantis non moins covido-sceptique prêt pour 2024 du côté républicain, les responsables des politiques de confinement et autres partisans du sérum pour tous n’en ont pas fini de transpirer. Carlson a choisi son camp, et il vient d’en faire les frais. Mais le censurer conduira inévitablement à le rendre encore plus libre et donc à le rendre encore plus intransigeant. En s’en séparant, la caste transpartisane au pouvoir a peut-être commis une grande erreur qu’elle risque un jour de payer cher.
https://twitter.com/RobertKennedyJr/status/1650550341027475479
Tucker Carlson n’a pas dit son dernier mot
Dans une vidéo publiée sur son compte Twitter le 27 avril, Carlson s’est montré très incisif et ne semble pas vouloir abandonner son combat contre les élites médiatiques et politiques qui lui ont tourné le dos. Lancera-t-il son propre média ? S’engagera-t-il en politique ? À suivre.
Good evening pic.twitter.com/SPrsYKWKCE
— Tucker Carlson (@TuckerCarlson) April 27, 2023