Après les prises d’otages de janvier dernier à Paris, les chaînes d’information en continu sont à niveau la cible de critiques après l’attaque du musée du Bardo de Tunis mercredi dernier.
En cause ? La diffusion par I‑Télé d’un entretien en direct avec une touriste française pendant la prise d’otages. La présentatrice, Myriam Bounafaa, déclare alors, imprudemment : « Géraldine, vous êtes retranchée au troisième étage… », donnant ainsi sa position en direct. N’ayant pas relevé la dangerosité de l’information, la touriste française en dit plus : « On est une quarantaine retranchés dans une salle. Une salle de mosaïques. On est un peu paniqués, on entend beaucoup de bruits. Il n’y a plus de tirs à l’extérieur, mais on entend beaucoup de cris… à l’extérieur. Et donc on est tous retranchés, par terre, dans une salle. On entend des… Oh… Ça tire, ça tire… »
Et la journaliste de poursuivre : « Vous avez le sentiment que les tirs s’approchent de là où vous vous trouvez ? », conduisant l’otage à faire un pas de plus dans l’auto-géolocalisation. « On s’est tous mis au sol. On est près d’une sorte de balcon avec des vitres », répond-t-elle.
Bien trop tard, Myriam Bounaffa stoppe le direct. « La sécurité de Géraldine nous conduit à arrêter ce témoignage », annonce-t-elle… avant de rappeler la présence de la touriste au troisième étage du bâtiment ! Une incroyable série d’imprudence qui n’aura pas manqué d’interpeller les internautes, et le CSA.
Contacté par Libération, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a indiqué qu’il « analysera le compte-rendu par ses services des événements tragiques qui viennent de se produire ». Sur son compte Twitter, la présentatrice de la chaîne d’info en continu a tenté de se justifier en expliquant : « Lors de l’ITW avec Géraldine (14h02), le musée était plein de touristes. Partout. Musée labyrinthe de 20 000 m². »
@LudovicFerro @itele Lors de l’ITW avec Géraldine (14h02), le musée était plein de touristes. Partout. Musée labyrinthe de 20 000 m².
— Myriam Bounafaa (@Myriam_Bounafaa) 18 Mars 2015
Quoi qu’il en soit, i>Télé ne semble pas avoir tiré les leçons des attentats de janvier dernier. Bien que la chaîne n’était pas directement visée par les remontrances du CSA, qui incriminait surtout BFMTV, i>Télé ne s’était pas gênée pour cosigner avec différents médias un coup de gueule où l’on mettait en garde contre « l’information menacée »…
Pourtant, le Conseil n’avait alors même pas prononcé de sanctions, et s’était contenté de mettre en demeure l’ensemble de ces chaînes de « ne plus renouveler de tels manquements à l’ordre public », car ces révélations « étaient susceptibles de menacer gravement la sécurité des personnes retenues dans les lieux ». Un avertissement des plus inconséquents, certes, mais qui avait le mérité d’être clair…
À noter que, de son côté, BFMTV s’est montrée beaucoup plus prudente. Contrairement aux événements de janvier, la chaîne a cette fois-ci pris le soin de ne pas diffuser son entretien d’une otage en direct, et a même réalisé un travail de montage sur la séquence afin que celle-ci ne puisse pas être localisée.