Le site d’Edwy Plenel, mais aussi Arrêt sur images, viennent d’être épinglés par le fisc pour non-paiement de la TVA “classique”. Une affaire qui pourrait leur coûter très cher mais qui illustre les règles ubuesques de Bercy.
L’administration fiscale n’a manifestement pas l’intention de passer l’éponge. Non seulement, elle a notifié le 6 novembre un redressement fiscal aux pure players d’informations Mediapart et Arrêt sur images, et à Indigo Publications (La Lettre A, etc), mais encore, elle entend bien le recouvrer dans les plus bref délais. L’enjeu financier est de taille. Arrêt sur images, qui réalise environ un million d’euros de chiffre d’affaires par an, est redevable de 540 000 euros. La somme grimpe à plus de 4 millions d’euros dans le cas de Mediapart. Du coup, les deux sites ont lancé un appel à leurs lecteurs qui aurait rapporté près de 300 000 euros en trois jours à Mediapart. Le site a de surcroît une trésorerie solide (près de 5 millions d’euros) qui lui permettra d’éponger la “dette” vis-à-vis du fisc. Ce n’est pas le cas d’Arrêt sur images.
L’application aux sites d’informations de la TVA préférentielle à 2,10% (au lieu de 19,6 puis 20%), réservée jusqu’en 2014, à la presse écrite est en cause. Affirmant se baser sur des textes reconnaissant la neutralité des supports (print et web), les trois sociétés se sont auto-appliqué ce taux très avantageux. Concernant Mediapart, cette situation de fait existe même depuis sa création en 2008. D’où le montant de la facture ! Ironie de l’histoire, le Parlement s’est finalement rangé à leurs arguments, défendus par le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (SPIIL). Députés et sénateurs ont eux-mêmes voté en 2014 une loi appuyant leur démarche. Cette dernière prévoit clairement que tous les supports reconnus de presse d’information politique et générale (IPG) ‑peu importe leur forme- bénéficieront à l’avenir de la TVA discount. Mieux, la Commission européenne, qui refusait de reconnaître le caractère IPG aux sites d’information (et servait de prétexte à la France pour maintenir sa position sur la TVA), devrait l’accepter en 2016.
La concomitance des premiers contrôles fiscaux, fin 2013, et de la sortie de l’affaire Jérôme Cahuzac par Mediapart, est de nature à laisser planer le doute sur les raisons exacte du redressement. Pour le “procureur” Edwy Plenel, cela ne fait pas de doute : Bercy se venge et tente de faire taire Mediapart. Ce ne serait pas la première fois qu’un gouvernement s’en prendrait aux titres politiquement incorrects. A l’autre bout de l’échiquier, la Ministre de la culture, Fleur Pellerin a annoncé début novembre que les aides pour les journaux à faibles ressources publicitaires seraient suspendues pour ceux condamnés pour discrimination raciale. Minute devrait ainsi être privé de plusieurs dizaines de milliers d’euros par an. Le quotidien communiste L’Humanité, dont on connaît l’engouement à défendre les pires dictatures au fil de l’histoire, continuera lui à percevoir plus de trois millions d’euros annuellement, payés par le contribuable.
Crédit photo : marqueton via Flickr (cc)