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Un forum très (trop) rémunérateur de Libération au Gabon

8 avril 2019

Temps de lecture : 3 minutes
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Un forum très (trop) rémunérateur de Libération au Gabon

Temps de lecture : 3 minutes

Tout début avril 2019, la rédaction de Libération votait à 77% une motion de défiance contre sa direction. Elle réclamait aussi d’ici fin juin la nomination d’un administrateur pouvant la représenter dans les instances de direction du groupe qui décide de la gestion du journal, le groupe Altice de Patrick Drahi. Pierre Fraidenbach a démissionné de ses fonctions à la chaine BFM Business et Laurent Joffrin est sur la sellette. Récit d’un scandale qui touche aussi les autorités gabonaises.

Libération au pays de l’or noir

Cette para­phrase d’un album de Tintin pour­rait résumer l’affaire. Quelques mois après la prise de con­trôle de Patrick Drahi à l’été 2015, le quo­ti­di­en organ­ise les 9 et 10 octo­bre 2015 un forum à Libre­ville au Gabon, petit pays riche en pét­role. Ali Bon­go, qui a suc­cédé à son père en 2009, veut redor­er son bla­son et organ­is­er une ruti­lante opéra­tion de com­mu­ni­ca­tion avec le con­cours de Libéra­tion.

Même si une majorité de jour­nal­istes sont hos­tiles à l’opération, la direc­tion leur fait com­pren­dre que si cette man­i­fes­ta­tion n’a pas lieu, il fau­dra faire des économies de per­son­nel, autrement dit peut-être devoir se sépar­er de quelques col­lab­o­ra­teurs. Dit gentiment…

Pierre Fraidenraich à la manœuvre

Côté Libé, on peut sup­pos­er avec l’assentiment au moins pas­sif de Lau­rent Jof­frin (qui par­ticipe aux débats, source Let­tre A du 27 mars 2019), c’est Fraiden­raich alors directeur opéra­tionnel du quo­ti­di­en qui organ­ise. Mais pas tout seul, avec les ser­vices très act­ifs de la prési­dence gabonaise. Citons la Let­tre A :

Les ser­vices de la prési­dence gabonaise, alors cha­peautés par le tout-puis­sant directeur de cab­i­net Maix­ent Accrombessi, s’étaient active­ment investis dans la pré­pa­ra­tion du forum … côté Libéra­tion, l’organisateur du forum, Pierre Fraiden­raich, était alors asso­cié en affaires avec Éve­lyne Diat­ta-Accrombessi, épouse de Maix­ent Accrombessi ». Fraiden­raich « avait tra­vail­lé au lance­ment de la chaîne de télévi­sion panafricaine Edan, fondée et dirigée par Éve­lyne Diat­ta-Accrombessi. La société Dino­jo SAS (détenue par la famille Fraiden­raich) était dev­enue action­naire de la chaîne en jan­vi­er 2015 (…) Formelle­ment, la chaîne est détenue par une société bri­tan­nique, domi­cil­iée jusqu’en 2017 dans les bureaux lon­doniens du cab­i­net Mos­sack Fon­se­ca, au cen­tre de l’affaire des Pana­ma Papers. Edan était aus­si présente à Paris et a loué pen­dant deux ans (2016–2017) le dernier étage du siège d’Europe 1, rue François 1er… Maix­ent Accrombessi a, lui, quit­té le cab­i­net d’Ali Bon­go en 2016. Fin 2017, il a été mis en exa­m­en en France pour “cor­rup­tion pas­sive d’agent pub­lic étranger”, “blanchi­ment en bande organ­isée de cor­rup­tion pas­sive” et “faux et usage de faux”. Il est soupçon­né d’avoir perçu des com­mis­sions du fab­ri­cant français d’uniformes mil­i­taires Marck ».

Fraiden­raich a con­fir­mé être enten­du comme témoin et a pré­cisé que sa société ne déte­nait que 5% d’Edan en échange de con­seils et qu’il n’a jamais reçu de revenus de cette société.

Le pays de l’or noir blanchit-il trop blanc ?

Un sig­nale­ment de Tracfin a révélé d’étranges flux financiers autour du Forum. Ce ne sont pas moins de 3.5M€ qui ont été réglés par les autorités gabonais­es pour les ser­vices du jour­nal, à la stupé­fac­tion de la rédac­tion qui l’apprend qua­tre ans plus tard. Lau­rent Jof­frin a déclaré avoir vague­ment enten­du par­ler du con­trat sans être vrai­ment au courant.

Sur ces 3,5 M€ le quo­ti­di­en n’a perçu que 450 K€, la dif­férence soit 3 M€ ayant été ver­sés à la société mère « pour combler le déficit du jour­nal ». Plus joli, une com­mis­sion supérieure à 400 K€ aurait été ver­sée à une cer­taine Nadine Diat­ta, la belle-sœur de Maix­ent Accrombessi, l’associé de Frai­dren­raich (voir supra). C’est bien con­nu, l’argent – même celui du pét­role – n’a pas d’odeur.

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