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Une certaine idée, le média du passé chez LR

8 mai 2023

Temps de lecture : 5 minutes
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Une certaine idée, le média du passé chez LR

Temps de lecture : 5 minutes

Les Républicains lancent leur média ! Alors que la sphère mélenchoniste a su pérenniser, non sans difficulté, Le Media, c’est au tour de la droite parlementaire de se lancer dans l’exercice. Culte du passé proche explique, le média d’Éric Ciotti et de ses proches reprend le nom d’un ancêtre séguiniste : « Une certaine idée ».

Dans les vieux pots…

Vingt ans après son aban­don, la droite par­lemen­taire déterre un cadavre pour se dot­er d’un média ! En ligne de mire : la bataille des européennes (2024), puis les munic­i­pales (2026) et enfin la prési­den­tielle de 2027. Le pro­gramme élec­toral est chargé et il con­vient de s’y préparer.

Dans l’écosystème médi­a­tique, cha­cun à ses prés car­rés, vieux jour­naux ou nou­veaux médias, chaînes télévisées et réseaux soci­aux ; les par­tis poli­tiques français dis­posent tous de sup­ports mais la droite LR sem­ble un peu esseulée. Le Figaro n’est plus une valeur sûre car pas sys­té­ma­tique­ment cri­tique (comme LR) con­tre le prési­dent du « en-même temps ». Pour se dot­er d’un organe, Éric Ciot­ti est donc allé rechercher un média du temps où la droite était encore au pou­voir mais avant la péri­ode Sarkozy.

Il a donc fal­lu fouiller dans les car­tons du RPR et redonner vie numérique­ment à la revue Une Cer­taine Idée, créée par l’ancien maire de Brétigny-sur-Orge (Essonne) et secré­taire d’État à l’enseignement supérieur, Jean de Boishue, qui en fut le rédac­teur-en-chef. Ce dernier a d’ailleurs don­né un entre­tien pour le (re)lancement du média le 30 avril 2023.

L’héritage de Philippe Séguin ?

À côté du maire de l’Essonne, fig­u­rait un poids lourd de la droite en la per­son­ne du sou­verain­iste Philippe Séguin. Le cadre de la droite par­lemen­taire, qui s’était opposé au traité de Maas­tricht, voulait dot­er son par­ti d’un organe médi­a­tique, élé­ment qui man­quait cru­elle­ment pour une droite à la traîne en matière de com­bat cul­turel. La revue créée en 1998 don­nait alors la parole à des auteurs qui sor­taient de la « doc­trine » du RPR. Forte d’environ 5 000 abon­nés, ce for­mat papi­er trimestriel avait sus­cité un cer­tain engoue­ment au sein d’une famille poli­tique dans laque­lle ce type de paru­tion man­quait. Par­mi les con­tribu­teurs, on pou­vait d’ailleurs crois­er un cer­tain Jean Mes­si­ha qui a depuis évolué vers d’autres « cieux ».

L’actuelle for­ma­tion héri­tière de ce par­ti étant idéologique­ment assez éparpil­lée, il sera intéres­sant de dis­tinguer quelles « plumes » seront autorisées dans ce média. Quant à l’héritage gaulliste de celui-ci, il devrait s’en tenir à un ver­nis vague­ment régalien et à une cer­taine forme de retenue sans trop s’embarrasser de sou­verain­isme ou de rad­i­cal­ité. Sur la forme, le pas­sage au numérique est prob­a­ble­ment néces­saire mais rend la fil­i­a­tion assez floue, notam­ment avec un site qui pour l’heure ne laisse guère de place aux pro­duc­tions écrites et théoriques.

Des débuts bien peu sexy

La maque­tte du site et les con­tenus pro­posés depuis le pre­mier arti­cle le 28 avril n’attirent pas franche­ment l’œil et la présen­ta­tion faite par Éric Ciot­ti ne ras­sure pas : « il n’y a pas de grandes con­quêtes sans grandes idées ». Une for­mule qui ramène à l’identité poli­tique des Répub­li­cains, qui peinent à se situer dans un échiquier boulever­sé par l’avènement de l’hypercentre d’Emmanuel Macron.

Côté con­tribu­teurs, on retrou­ve l’historien Thier­ry Lentz (63 ans), l’ancien mag­is­trat Jean-Claude Magendie (77 ans) ou encore le haut-fonc­tion­naire, his­to­rien et ancien con­seiller de Séguin Arnaud Teyssier (64 ans). Côté têtes d’affiche, on retrou­ve l’urologue le plus célèbre de France, le doc­teur Lau­rent Alexan­dre, qui par­le d’intelligence arti­fi­cielle (ce qui n’est pas son domaine). Enfin pour des cheveux moins grison­nants, Une Cer­taine Idée a eu recours à un cer­tain Pierre Valentin qui traite de la ques­tion du « wok­isme » ; ce dernier a notam­ment tra­vail­lé pour la très libérale « Fon­dapol » (qui s’était asso­ciée au think tank de gauche Ter­ra Nova en 2014 en pleine cam­pagne européenne). Enfin, la « con­tro­ver­sée » lob­byste Agnès Verdier-Molin­ié s’occupe de par­ler de l’argent que vous pique l’État comme elle le fait déjà dans des médias comme L’Opinion ou Le Figaro.

Enfin, le chef d’orchestre, Bar­tolomé Lenoir, ancien directeur de l’association Con­tribuables Asso­ciés, devra con­duire cette bar­que médiatique.

Un avenir plus qu’incertain

L’architecture du site est assez clas­sique avec des arti­cles, des pod­casts, des entre­tiens… On se croirait presque sur un média avant d’ouvrir le lien adhérez qui ren­voie au site des Républicains.

À peine déter­ré, on voit mal com­ment Une Cer­taine Idée peut trou­ver un pub­lic. Le clip de lance­ment n’a pas de car­ac­tère pro­pre et mul­ti­plie les clichés de carte postale avec des pho­tos de vieux com­bat­tants de la droite.

Quant au prési­dent du par­ti Éric Ciot­ti, son laïus de lance­ment est mal­adroit et tein­té de fauss­es notes du type : « nous écrivons aujourd’hui une page blanche ».

Act­if depuis le 13 avril, le compte Twit­ter du média ne comp­tait pas 1 000 abon­nés après trois semaines et les con­tenus ne sont que très peu partagés. Dans l’arène des réseaux soci­aux et la jun­gle des médias en ligne, il sera très dif­fi­cile de se faire une place surtout avec la dépen­dance à un par­ti qui a enchainé les défaites élec­torales depuis une décennie.

Instal­lé au 4ème étage du siège des Répub­li­cains, le média se veut « sans tabou » mais on imag­ine assez mal Jean-Luc Mélen­chon ou Jor­dan Bardel­la pouss­er la porte d’entrée pour un entretien…

Née d’une promesse de cam­pagne d’Éric Ciot­ti, Une Cer­taine Idée, devra se sin­gu­laris­er pour touch­er un pub­lic large et envis­ager de tou­jours exis­ter quand le député des Alpes-Mar­itimes passera la main.

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