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USAID et presse « indépendante » hongroise : l’OJIM avait vu juste

3 mars 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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USAID et presse « indépendante » hongroise : l’OJIM avait vu juste

Temps de lecture : 5 minutes

L’Observatoire du journalisme publie régulièrement des articles sur la situation de la presse en Hongrie, ce pays faisant souvent l’objet d’un traitement partial de la part des médias français. Les révélations récentes dans la cadre de l’affaire USAID viennent donner raison à notre travail sur le paysage médiatique de cette nation d’Europe centrale et orientale.

Une presse d’activistes

Drôle d’indépendance que celle qui con­siste à recevoir des fonds du gou­verne­ment améri­cain, en tout cas de celui de Joe Biden, le duo Trump-Musk ayant ordon­né la liq­ui­da­tion de cette manne qui était des­tinée à pro­mou­voir « la démoc­ra­tie ». Il est désor­mais avéré que l’USAID a financé au total 6200 jour­nal­istes et 700 organes de presse.

En Hon­grie, les médias d’opposition for­ment un secteur vigoureux ouverte­ment hos­tile au pou­voir en place. Les médias Telex, 444, Par­tizán, et bien d’autres, attaque­nt le Pre­mier min­istre Orbán, ses alliés et ses amis poli­tiques au quo­ti­di­en, dans un style qui ferait rou­gir la presse oli­garchique française. En réal­ité, sous cou­vert d’indépendance et d’objectivité, ces organes de presse hon­grois sont des activistes avec un seul objec­tif : liq­uider Vik­tor Orbán et ses alliés.

Voir aus­si : Hon­grie : un média libéral-lib­er­taire lance une académie avec de l’argent pub­lic US

Le pot aux roses découvert

Le plus grand béné­fi­ci­aire des pro­grammes USAID en Hon­grie n’est autre que Telex et son académie de for­ma­tion ayant touché la somme de 740 000 dol­lars. Et que dire de la société éditrice du média 444, Mag­yar Jeti Zrt., qui a été aidée par le con­tribuable améri­cain pour se pay­er un stu­dio d’enregistrement flam­bant neuf ou encore un site annexe, Qubit, au rôle pré­ten­du­ment sci­en­tifique, mais qui reprend en réal­ité tous les thèmes de la théorie du genre et du lob­by LGBTQ.

Cette pluie de dol­lars était facil­itée par l’ancien ambas­sadeur US à Budapest David Press­man, enne­mi juré du Fidesz, mar­ié à un homme et « père » de deux petits garçons, qui veil­lait au grain pour arroser les médias suiv­ants : Mag­yar Hang, Átlát­szó, a Klu­brádió, Jelen, Mag­yar Narancs, Tilos Rádió, Szabad Pécs, Bor­sod 24, Szol 24, Szabolcs 24, Debrecin­er, Nyugat.hu, etc. Mais encore, sous la forme de sub­ven­tions : Élet és Iro­dalom, le groupe d’influenceurs Fókusz Stúdió, Mag­yar Narancs, Szeged­er, eNyu­gat et Revi­zor Online. Et la liste est encore longue, en réal­ité qua­si­ment tous les médias d’opposition hon­grois ont béné­fi­cié du sou­tien améri­cain, par le biais de sub­ven­tions et l’intermédiaire de l’ambassadeur Pressman.

La directrice de l’USAID et la gauche hongroise

Il y a deux ans, lors de sa vis­ite à Budapest, Saman­tha Pow­er, alors direc­trice de l’USAID, avait d’ailleurs en par­tie été dévoilé ce sys­tème d’influence en s’entretenant avec nom­bre de respon­s­ables de cette presse dite « indépen­dante » en appelant très con­crète­ment à aider à dévelop­per leur audi­ence et à faire le néces­saire pour assur­er leurs sources de revenus.

Et la patronne de l’USAID n’avait alors pas caché ses liens avec la classe poli­tique hon­groise opposée au Fidesz. En effet, une pho­to con­firme que Gábor Polyák, le chef du cab­i­net chargé de la poli­tique de la presse et des médias du can­di­dat de gauche au poste de pre­mier min­istre en 2022, et con­seiller de l’an­cien cab­i­net du pre­mier min­istre Fer­enc Gyurcsány, a ren­con­tré séparé­ment Saman­tha Pow­er et David Pressman.

Il est impor­tant de not­er que c’est Polyák, que l’on peut dif­fi­cile­ment qual­i­fi­er d’indépen­dant, qui dirige l’ate­lier d’analyse du média Mérték, qui, avec l’aide de la fon­da­tion Eco­com­pass, favorisée par Brux­elles, a décidé quels médias en dol­lars devaient recevoir des fonds américains.

Une collaboration de longue date

Dans le même temps, les don­nées de l’U­SAID mon­trent égale­ment qu’a­vant la vis­ite de Pow­er, des jour­nal­istes rece­vaient de l’ar­gent des États-Unis. La soi-dis­ant Fon­da­tion des jour­nal­istes indépen­dants, par exem­ple, a reçu 24 838 dol­lars en 2018, soit près de 10 mil­lions de forints aux taux de change actuels, pour for­mer des jour­nal­istes du départe­ment d’É­tat améri­cain dans le cadre des pro­grammes de diplo­matie publique, qui visent à soutenir la poli­tique étrangère des États-Unis. En 2020–2021, elle a reçu 19 000 dol­lars pour organ­is­er un dia­logue social sur l’im­pact de 1945, tan­dis qu’en 2019–2020, elle a reçu 18 000 dol­lars pour un fonds jour­nal­is­tique des­tiné à com­mé­mor­er 1989.

La fon­da­tion, qui compte actuelle­ment un seul mem­bre, a présen­té son dernier rap­port financier en 2022, mais il y a quelques années, elle col­lec­tait des dons fis­caux d’un pour cent avec Direkt36, un por­tail égale­ment financé par George Soros, qui vient de pub­li­er un reportage à charge con­tre le Pre­mier min­istre hon­grois et sa famille.

Les indépendants crient au scandale

Ayant con­staté qu’une source impor­tance de ses revenus allait être coupée, cette presse a titré en masse « La presse indépen­dante en dan­ger en rai­son des mesures de Trump ». Que cette presse ne soit pas objec­tive sur les ques­tions de poli­tique intérieure est un secret de polichinelle en Hon­grie. Les lecteurs hon­grois savent tous ce qu’ils con­som­ment, et l’aspect « pro- ver­sus anti– » du paysage médi­a­tique est par­faite­ment inté­gré dans la cul­ture hongroise.

Les Hon­grois savent désor­mais qu’un pan entier de la presse hon­groise a cou­vert la cam­pagne prési­den­tielle améri­caine en ayant des liens directs avec l’administration de Biden. Un con­stat qui devrait inter­roger au-delà des fron­tières de la Hon­grie, en France notam­ment, où la grande presse campe sou­vent sur des posi­tions claire­ment anti-Trump.

Yann Cas­par

Voir aus­si : Les finance­ments occultes de l’USAID aux médias libéraux lib­er­taires d’Europe cen­trale et orientale

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