Ojim.fr
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
Wokipédia : Wikipédia est-il une source fiable ? Première partie

16 septembre 2024

Temps de lecture : 8 minutes
Accueil | Dossiers | Wokipédia : Wikipédia est-il une source fiable ? Première partie

Wokipédia : Wikipédia est-il une source fiable ? Première partie

Temps de lecture : 8 minutes

Témoignage : « Lorsque j’étais au col­lège, nous n’avions pas le droit de nous servir de Wikipé­dia pour nos exposés, parce que les fich­es pou­vaient être écrites par n’importe qui. Quand je suis arrivée au lycée, mon pro­fesseur de physique a tem­péré cette affir­ma­tion et annon­cé qu’elle-même util­i­sait par­fois Wikipé­dia, y com­pris sur des sujets assez poin­tus. Aujourd’hui, si les fich­es sci­en­tifiques sont con­sid­érées comme des sources tout à fait fiables et recev­ables, il n’en va pas de même pour tout ce qui con­cerne l’actualité : mots choi­sis, infor­ma­tions biaisées, voire arti­cles délibéré­ment louangeurs ou à charge, Wikipé­dia n’a plus cette aura d’encyclopédie numérique dont elle béné­fi­ci­ait au début des années 2010. Pire : deux scan­dales bap­tisés « Wokipé­dia », l’un français et l’autre améri­cain, écor­nent sérieuse­ment la répu­ta­tion du site Inter­net, devenu sou­vent un instru­ment de pro­pa­gande. » Un dossier OJIM.

« L’histoire est écrite par les vain­queurs. Enfin, sauf si vos enne­mis sont encore en vie et ont du temps pour éditer Wikipédia. »
Elon Musk

Comment fonctionne Wikipédia ?

Comment Wikipédia est devenu de gauche : une plateforme détournée de sa vocation

Wikipé­dia, une ency­clopédie gra­tu­ite et sans pub­lic­ité don­nant accès à un savoir pré­cis, véri­fié, exhaus­tif, et ce sur qua­si­ment tous les sujets. Le moyen le plus rapi­de d’avoir accès à une infor­ma­tion sim­ple (qui est le député de Sav­i­gny-sur-Orge ?) ou plus com­plexe (quel est le déroulé de la guerre des Deux-Ros­es ?). L’idée, née en 2002, est sim­ple et louable, et Wikipé­dia s’est très vite imposé, dans les recherch­es Google comme dans les esprits. Le site compt­abilise 3,8 mil­lions de vis­i­teurs uniques par jour, ce qui en fait le huitième site le plus vis­ité en France.

Mais depuis quinze ans, la plate­forme est dévoyée. Ce n’est pas une extrême-droite ran­cu­nière qui le dit, c’est Lar­ry Sanger, co-fon­da­teur de Wikipé­dia, qui n’a plus con­fi­ance dans son pro­pre tra­vail. Il estime que le site a totale­ment per­du sa neu­tral­ité à par­tir de 2009 et qu’aujourd’hui, les biais idéologiques « anti-droite » sont très nom­breux, trop nom­breux pour qu’on puisse avoir con­fi­ance dans l’encyclopédie numérique.

Wikipédia, un système hiérarchique

Pour écrire sur Wikipé­dia, il faut sim­ple­ment avoir un compte con­tribu­teur. Il s’agit d’un engage­ment bénév­ole et, vu le nom­bre de comptes act­ifs – 17 000 en France – on pour­rait croire que la neu­tral­ité des infor­ma­tions est garantie. Il n’en est rien. Les con­tribu­teurs, groupés en com­mu­nautés lin­guis­tiques, élisent des admin­is­tra­teurs – 148 en France. Ces derniers peu­vent ban­nir ou blo­quer les comptes dont les actions sont jugées con­traires aux valeurs de Wikipé­dia, ain­si que restau­r­er, sup­primer ou pro­téger une page. Un sys­tème qui peut rapi­de­ment devenir un vase clos, où ne sont admis que ceux qui cor­re­spon­dent à la doxa. Michel, con­tribu­teur ban­ni en 2021, estime que cette sanc­tion est tombée lorsqu’il a fait remar­quer « qu’il serait bien qu’il y ait une plu­ral­ité d’opin­ions par­mi les con­tribu­teurs ». « Selon les obser­va­tions de plusieurs d’en­tre nous, la majorité silen­cieuse, qui n’est d’au­cun bord poli­tique, n’est pas représen­tée », continue-t-il.

Un glissement au plus haut niveau

L’évolution de Wikipé­dia n’a rien d’étonnant. Si l’on peut accorder à Lar­ry Sanger une recherche de neu­tral­ité et d’objectivité, par la suite, tous les dirigeants de Wikipé­dia n’ont pas suivi sa voie. Kather­ine Maher a été la direc­trice générale de la Fon­da­tion Wikimé­dia de 2016 à 2021. Selon elle, les con­tribu­teurs de Wikipé­dia ne s’attachent pas à retran­scrire la vérité mais le meilleur des con­nais­sances actuelles. Jusque-là, rien que de très nor­mal pour une encyclopédie.

Kather­ine Maher a cepen­dant une con­cep­tion étrange de la vérité. Elle ne doit pas être ce dont on cherche à con­va­in­cre, car notre « vénéra­tion envers la vérité » a pu nous éloign­er de la recherche de con­sen­sus, qui per­met de réalis­er les pro­jets impor­tants. Si la vérité est quelque chose de beau et de néces­saire à l’accomplissement de l’homme, l’une de ses beautés et aus­si qu’il existe « de nom­breuses vérités dif­férentes » et que cha­cun a sa pro­pre vérité. Pour Kather­ine Maher, notre vérité est notam­ment con­sti­tuée de nos croy­ances. Ce rel­a­tivisme est loin d’être anodin pour celle qui a dirigé l’un des plus gros ensem­bles ency­clopédiques du monde. À par­tir du moment où l’on ne croit pas que cer­taines choses puis­sent être fauss­es, quand bien même cer­tains y croient, com­ment peut-on tra­vailler à l’accès au savoir ?

Une réécriture de la réalité

L’équité de la connaissance au détriment de la vérité

La Fon­da­tion Wikimé­dia ne tra­vaille donc pas à la tran­scrip­tion de la vérité, mais à l’équité de la con­nais­sance, qui con­siste à « laiss­er la place aux con­nais­sances et aux com­mu­nautés qui ont été exclues par les struc­tures de pou­voir et de priv­ilège ». Ce par­a­digme qui estime que les Occi­den­taux (les Européens), car il s’agit bien d’eux, sont des priv­ilégiés qui doivent s’effacer devant de sup­posés opprimés, quelles que soient par ailleurs les com­pé­tences des uns et des autres, est cou­tu­mi­er de la gauche, qui ne se réjouit jamais autant que lorsqu’un prix quel­conque est attribué à une femme racisée, et de préférence homosexuelle.

Les dons pour le savoir, changés en dons pour la gauche

Cepen­dant, Wikipé­dia, ain­si que ses satel­lites comme Wic­tion­nary, ne sont jamais que des ency­clopédies : ils rassem­blent des don­nées, mais n’en créent pas. La Fon­da­tion recon­naît avoir besoin de cita­tions et de sources pri­maires qui com­bat­tent pour la même cause qu’elle. Elle explique donc que « le Fonds Équité est conçu pour fournir des sub­ven­tions à des organ­i­sa­tions extérieures à notre mou­ve­ment ». Autrement dit, lorsqu’un dona­teur soucieux du main­tien de l’accès gra­tu­it au savoir donne à Wikipé­dia, la moitié de son don est redistribuée.

À qui ? À des asso­ci­a­tions qui œuvrent pour l’équité raciale. Cer­tains de ces organ­ismes veil­lent à don­ner la parole et les respon­s­abil­ités, non au plus com­pé­tent, mais au plus représen­tatif des dif­férentes minorités. Van­guard­STEM fait par­tie des béné­fi­ci­aires des dons de la Fon­da­tion Wikimé­dia. Il s’agit d’une « plate­forme con­cen­trée sur les expéri­ences des femmes, filles et per­son­nes non-binaires de couleur dans la sci­ence, la tech­nolo­gie, l’ingénierie et les math­é­ma­tiques (STEM) ». Van­guard­STEM pro­pose une « méthodolo­gie sci­en­tifique inter­sec­tion­nelle » et défend « le droit des Noirs, des indigènes, des femmes de couleur et des per­son­nes non-binaires de couleur » à défendre eux-mêmes leurs « intérêts et iden­tité STEM », sans assimilation.

Cette asso­ci­a­tion défend donc les biais liés à l’identité sex­uelle et eth­nique dans la recherche sci­en­tifique. Une vision qui rejoint par­faite­ment celle de Kather­ine Maher, qui estime que cha­cun peut avoir sa pro­pre vérité.

Le mouvement Wikimédia, un agenda wokiste

Par les dons à Wikipé­dia, c’est donc la fon­da­tion que l’on nour­rit. Elle admin­istre depuis 2020 le « Fonds d’Équité de la Con­nais­sance », qui ne brasse pas moins de 4,5 mil­lions de dol­lars. Son objec­tif est avant tout de garan­tir à tous un accès à la con­nais­sance, objec­tif louable s’il en fut.

Cepen­dant, l’unique grille de lec­ture pour attein­dre ce but est raciale.et anti européens. La Fon­da­tion Wikimé­dia dit ain­si abor­der « les iné­gal­ités raciales entra­vant l’accès et la par­tic­i­pa­tion à la con­nais­sance libre » et inve­stir « dans des organ­i­sa­tions qui s’attaquent aux sys­tèmes de préjugés et d’inégalités raciales dans le monde entier ». Le monde entier, ce n’est prob­a­ble­ment pas l’Afrique du Sud, où le racisme anti-blanc est quasi-institutionnel.

Des mots choisis, des définitions tronquées

Des différences de traduction pour suivre l’opinion nationale

Faîtes un test : tapez dans votre moteur de recherche « gaza geno­cide wikipedia ». Si vous faîtes la plu­part de vos recherch­es en français, la pre­mière page qui s’affichera se nom­mera « Risque de géno­cide à Gaza depuis 2023 ». Passez cette page en anglais, elle devient « Gaza geno­cide ». Pourquoi ? Parce que le pub­lic anglo­phone est de toute évi­dence plus per­méable aux asser­tions de la gauche affir­mant que le géno­cide des Gaza­ouis est une réal­ité, tan­dis qu’en France, il vaut mieux par­ler de risque pour être audible.

Les dif­férences ne s’arrêtent d’ailleurs pas qu’au titre. Sans aller jusqu’à citer l’intégralité des deux textes, la page anglo­phone affirme que « les experts, les agences gou­verne­men­tales et des Nations unies et les ONG accusent Israël de per­pétr­er un géno­cide à l’encontre du peu­ple pales­tinien. » Sur la page fran­coph­o­ne, on lit que « le risque de géno­cide à Gaza depuis 2023 désigne les actions entre­pris­es par Israël pen­dant la guerre Israël-Hamas de 2023 pou­vant amen­er à un géno­cide con­tre les Palestiniens. »

Cette com­para­i­son prou­ve, une fois encore, que Wikipé­dia n’a que faire de la vérité, et s’intéresse avant tout à ce que ses lecteurs sont capa­bles de lire, pour ensuite le penser. À suivre.

Voir aussi

Vidéos à la une

Derniers portraits ajoutés